Maladie de Castleman : “Nous devons sensibiliser la médecine et les médias à la maladie.”
Publié le 21 déc. 2022 • Par Candice Salomé
Ivann Lamy, patient et président de l’Association des "Patients atteints de la maladie de Castleman", revient sur les premiers symptômes de la maladie de Castleman multicentrique idiopathique, sa prise en charge, l’évolution de la maladie et ses traitements. Il a créé son association afin de sensibiliser la médecine et les médias à cette maladie rare dans le but de réduire le temps de prise en charge et d’améliorer les traitements. Il se livre dans son témoignage pour Carenity.
Découvrez vite son histoire !
Bonjour Ivann, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions.
Tout d’abord, pourriez-vous nous en dire plus sur vous ?
Bonjour, ma naissance a eu lieu au sud du Chili en 1974, j’ai aujourd’hui 48 ans. Je suis citoyen français.
Je suis arrivé en France en 1979, et j’ai passé mon enfance et adolescence entre Chartres et Le Mans, en Eure-et-Loir dans un ancien territoire nommé le Perche.
Je suis célibataire, j’ai un frère de 42 ans demeurant, comme moi, proche de Paris.
Je pratique la peinture, j’aime la photographie, l’Histoire, les minéraux, les peuples autochtones. J’ai plusieurs engagements associatifs.
Je suis diplômé en Histoire de l'Art.
Vous êtes atteint de la Maladie de Castleman. Pourriez-vous nous dire quelles ont été les premières manifestations de la maladie ? Qu’est-ce qui vous a poussé à consulter ? Combien de médecins avez-vous rencontré et quels examens avez-vous dû passer ?
J’ai la maladie de Castleman multicentrique idiopathique. Il y a plusieurs formes de la maladie de Castleman, on pourrait même dire plusieurs maladies de Castleman nommée aussi tumeurs de Castleman.
Ma première Castleman multicentrique idiopathique s’est déclarée à 30 ans. Cela a commencé par une grosse fièvre à plus de 40 degrés qui a duré plusieurs jours, des sueurs intenses la nuit, un mal de dos et des brûlures au niveau des épaules insoutenables, des remontées gastriques, une asthénie presque paralysante, des difficultés à marcher… Une perte de poids conséquente et rapide, du goût pour aucun aliment gras. Il n’y a que le liquide qui passait à ce moment-là. Il y a eu des vomissements et des toux incessantes aussi.
Tout cela m’a amené à prendre contact avec mon médecin traitant et elle a m’a envoyé au service “Maladies tropicales et virus” de la Pitié-Salpêtrière.
J’ai dû faire des radiographies, PET scan, recherches sanguines de plusieurs virus et maladies tropicales puis je suis allé, après plusieurs mois, au service médecine interne/ maladies rares. Il a fallu plus de 12 mois encore pour avoir un diagnostic après analyses de tumeurs rénales et du dos.
A l’époque, la chirurgie a suffi et donc, en quelques mois, après de nombreuses séances de kinésithérapie, ma vie est revenue à la normale au niveau physique. Socialement, ça a été très long car je n’ai pas reçu de soutien ou de suivi social.
J’ai fait une rechute à 40 ans avec les mêmes symptômes, plus un diabète de type 2 insulino-dépendant. Une exérèse d’une tumeur thoracique a été faite mais elle n’a pas guéri la maladie.
J’ai fait des allers et retours pendant 4 ans à l’hôpital Mondor à Créteil. A 44 ans, j’ai eu un traitement au Tocilizumab tous les jours de 600 mg. Le traitement a été levé au bout de deux ans, mais il y a eu rechute. Donc, on a dosé à 300 mg et, aujourd’hui, je suis une cure toutes les 5 semaines.
Quels sont les symptômes de la Maladie de Castleman? Est-ce handicapant au quotidien ? Est-elle évolutive ?
Ils peuvent être très différents selon les cas, mais la fièvre, la grosse fatigue, les douleurs neurologiques ou musculaires, les sueurs nocturnes et la perte de poids semblent présents dans de nombreux cas de MCM idiopathique ou MCM HHV8 et/ou HIV, et aussi dans certains cas non asymptomatiques de MC unicentrique.
C’est plus ou moins handicapant au quotidien, étant polypathologique, ça m’handicape parfois lourdement.
La maladie, grâce à la cure de Tocilizumab, est depuis plus deux ans stable malgré la baisse du traitement à 300mg.
Quelle est votre prise en charge actuelle ? En êtes-vous satisfait ? Quels sont vos traitements ? En êtes-vous satisfait ?
J’ai des cures de Tocilizumab toutes les 5 semaines, c’est très satisfaisant. J’ai un suivi infirmier et un suivi psychologique et psychiatrique au CMP de ma ville. J’ai un traitement assez lourd pour le diabète type 2 insulino-dépendant.
Est-ce que vous vous sentez soutenu par votre entourage ? Comprennent-ils la maladie ?
Avec beaucoup de temps, la maladie est aujourd’hui acceptée et comprise dans la mesure des connaissances actuelles.
Vous avez décidé de monter votre association “Association des patients atteints de la maladie de Castleman”, pourriez-vous nous dire comment vous est venue l’idée de ce projet ?
C’est lors d’une visite au centre de référence de la maladie de Castleman à l’hôpital Saint-Louis, qu’exposant mes engagements associatifs, le professeur Oksenhendler m’a demandé si je me voyais monter une association de patients. Il m’a convaincu en me détaillant l’utilité d’une telle démarche. Il m’a recommandé de prendre contact avec Gersende Rousteau (MCM idiopathique) et David Bazin atteint d’une unicentrique avec complications. Ils sont respectivement Secrétaire Générale de l’association et Trésorier de l’association.
Le Professeur, qui est chef de service de l’unité immunologie pathologique de l’hôpital Saint-Louis et responsable du centre de référence sur la maladie de Castleman, est notre Conseiller Scientifique et Membre d’honneur de l’association. Seuls les patients votent, mais les familles, proches, amis et experts peuvent adhérer gratuitement à l’association, les dons sont acceptés.
Quels sont les objectifs et les principales missions de votre association ?
Les objectifs de l’association sont de réduire le temps d’attente pour un diagnostic précis, donc sensibiliser les scientifiques, les médecins et le grand public sur les spécificités de cette maladie - ces maladies, car chaque Castleman a sa particularité.
Notre mission est de créer une réelle communauté travaillant avec la médecine et les médias pour collecter des informations et une force d’action afin que les progrès concernant ces maladies de Castleman puissent arriver à un soin stoppant cette affection.
Quelles sont les actions que vous menez ou que vous souhaitez mener ?
Nous avons déjà réussi à créer un petit groupe pour monter l’association. Être soutenus par un parrain et conseiller scientifique prestigieux - car un des meilleurs dans son domaine et en lien avec les chercheurs et avancées dans d’autres pays – est un très bon début.
Nous avons déjà une page Facebook nommée Patients atteints de la maladie de Castleman qui a pour but de relayer les informations les plus récentes sur cette maladie.
On va créer une communauté d’écoute et de suivi. Nous ne sommes pas médecins mais nous avons assez d’empathie pour soutenir celles et ceux qui doutent, sont perdus ou angoissés ou qui ont juste besoin de parler.
On peut aussi leur indiquer les points relais de recherche sur la maladie de Castleman.
De plus, une fois par an, on fera un évènement pour récolter des dons que nous remettrons à la recherche sur la maladie de Castleman, ce sera sûrement symbolique. Mais cela nous rendra un peu acteurs dans la prise en charge de la maladie au lieu d’être juste patients.
Que pensez-vous de la prise en charge de la maladie de Castleman en France, que faudrait-il améliorer ?
En France, il faut réduire le temps de diagnostic, trouver les raisons de l’apparition de la maladie, être plus précis sur ses conséquences annexes et les risques d’apparition d’autres maladies connexes à la Castleman.
Il faut, pour cela, recenser plus précisément tous les malades de la Castleman, donc mieux former les hôpitaux, les médecins, les scientifiques… Comme c’est une maladie au pronostic long, à la durée longue, il faut un accompagnement psychologique du patient et parfois de la famille pour qu’elle accompagne au mieux le malade… La Castleman ce n’est pas un rhume ou dans la tête, ça peut être handicapant.
Chez Carenity, nous avons des membres atteints de la Maladie de Castleman ainsi que des proches de patients, quels conseils donneriez-vous ?
Vous avez en France la chance d’avoir une association qui travaille avec une unité spécialisée dans la maladie de Castleman, rejoignez-nous ! Pour nous enrichir de vos témoignages, vous faire entendre et former une communauté unie dans l’empathie et l’envie d’informer, et de mettre fin à cette maladie.
Avez-vous un dernier message à faire passer ?
Il faut regarder l’avenir avec confiance, pour une maladie si rare en France beaucoup de gens s’en préoccupent, et on peut croire que cela donnera des résultats probants dans les années où quelques décennies qui arrivent.
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