SOPK, DT2, fibromyalgie, polyarthrite rhumatoïde : “Mes nombreuses pathologies m’empêchent d’avoir une prise en charge globale.”
Publié le 18 mai 2022 • Par Candice Salomé
Elodie est atteinte de polyarthrite rhumatoïde, de SOPK, de DT2 et de fibromyalgie. Aujourd’hui en invalidité, elle se bat pour aider, soutenir et encourager les patients atteints de maladies chroniques invisibles à faire face aux nombreux préjugés liés à la maladie au travers des réseaux sociaux. De plus, désireuse de devenir maman, elle entre dans un parcours de PMA. Elle se livre dans son témoignage pour Carenity !
Découvrez vite son histoire !
Bonjour Elodie, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions.
Tout d’abord, pourriez-vous nous en dire plus sur vous ?
Je m'appelle Elodie, j'ai 31 ans. Jusqu’à récemment, je travaillais en tant que chargée d'assistance mais depuis fin 2021, après un long combat pour faire reconnaître mes maladies invisibles et chroniques afin de pouvoir adapter mon poste, j'ai finalement été licenciée pour une inaptitude. Depuis je suis en invalidité, ce qui me permet de prendre soin de moi pour mieux rebondir par la suite. Avec mon conjoint, nous avons le magnifique projet d'avoir un enfant, nous essayons depuis plusieurs années, d'ailleurs, nous rentrons en parcours PMA.
Vous êtes atteinte de plusieurs pathologies. Pourriez-vous nous dire lesquelles ? Quand avez-vous été diagnostiquée pour chacune d’entre elle ? Quelles en ont été les premières manifestations ?
Effectivement, j'ai la petite particularité d'avoir 4 pathologies chroniques dites invisibles.
A l'âge de 12 ans, j'ai été diagnostiquée d'une polyarthrite rhumatoïde. J'avais, avant la pose du diagnostic, eu des douleurs et gonflements pendant plusieurs mois aux mains, aux pieds et des soucis aux genoux.
J'ai longtemps su que j'avais des soucis hormonaux depuis mon adolescence (absence de règle, hyper pilosité, soucis de peau, etc..) mais, faute de prise en charge sérieuse, je n'ai eu la confirmation du syndrome des ovaires polykystiques que lors de la découverte de mon diabète de type 2.
Mon diabète de type 2 a été découvert lors d'un malaise très important sur mon lieu de travail. J'ai été transportée en urgence à l’hôpital avec plus de 14 d'hémoglobine glyquée ! Dans un premier temps, aux urgences, les médecins ont pensé que j’étais diabétique de type 1 au vu de mon âge (27 ans). Après plus de 3 semaines d'hospitalisation et un bilan complet, il en est ressorti que j'avais bien un diabète type 2 ainsi que le SOPK.
En 2021, j'ai consulté un médecin de la douleur dans un centre anti-douleur. Grâce à cette prise en charge, j'ai pu faire un point complet sur l'ensemble de mes douleurs. Depuis plusieurs années, les douleurs augmentent mais ma rhumatologue de l'époque ne prenez plus en compte ce que je vivais…
C'est alors le médecin de la douleur qui, en regroupant toutes mes nouvelles douleurs, m'a posé le diagnostic d'une fibromyalgie.
Depuis, j'ai changé de rhumatologue et je suis mieux prise en charge.
J'apprends petit à petit à conjuguer avec les difficultés et douleurs de chaque pathologie afin de vivre au mieux.
A quoi ressemble le quotidien avec le diabète de type 2, la fibromyalgie, le syndrome des ovaires polykystiques et la polyarthrite rhumatoïde ? Bénéficiez-vous d’une prise en charge globale ou voyez-vous plusieurs spécialistes ? Que pensez-vous de votre prise en charge actuelle ? Quels sont vos traitements ?
Mon quotidien peut être différent d'un jour à l'autre, tout dépend de ma fatigue et de mes douleurs. J'utilise la théorie des cuillères pour me permettre d'honorer mes rendez-vous importants et de continuer à vivre le plus facilement les jours où c'est plus difficile.
Concernant mes traitements, je m'administre quotidiennement de l'insuline rapide et lente, j'ai également une injection par semaine de biothérapie. Je prends également des hormones et des compléments alimentaires.
J'utilise des méthodes douces telles que l'utilisation du TENS, des séances d'hypnose en plus des anti-douleurs. Il m'est aussi indispensable de faire des séances de kinésithérapie 2 à 3 fois par semaine.
Malheureusement, il est difficile d'avoir une prise en charge totalement globale quand on a 4 pathologies, c'est toujours une difficulté en plus. Par exemple, quand je dois prendre des nouveaux traitements, on doit s'assurer qu'ils n’interfèrent pas avec ceux des autres pathologies. Il faut se l'avouer, c'est parfois un casse-tête pour que certains spécialistes prennent mes difficultés en compte dans leur globalité.
Mon médecin traitant est le trait d'union indispensable entre mes différents spécialistes.
Ma prise en charge en centre anti-douleurs l'année dernière m'a été bénéfique tant pour la prise en charge de mes douleurs que la prise en charge du côté psychologique. Cela m'a permis d'avoir accès, par exemple, à des séances de sophrologie ainsi qu'un suivi psychologique. J'ai dû déménager, j'attends donc une place dans le centre anti-douleur de mon nouveau département pour continuer cette prise en charge qui est essentielle.
Selon vous ou ce qu’en disent les médecins, existe-t-il un lien entre vos pathologies ?
Il existe un lien entre le diabète de type 2 et le SOPK. La résistance à l'insuline créé par le SOPK est un des facteurs de risque menant au diabète de type 2.
Concernant la fibromyalgie, le médecin de la douleur m'a expliqué qu'il était fréquent qu'un patient atteint de maladies rhumatismales souffre parfois aussi de fibromyalgie, mais sans m'en expliquer la raison.
Au quotidien, quelle pathologie demande le plus de suivi ou est la plus handicapante ? Pourquoi ?
Chaque pathologie a un impact différent sur mon quotidien. Sans hésitation, c'est le diabète qui me demande une charge mentale importante, je ne peux passer une journée sans penser à ma glycémie ou aux doses d'insuline que je dois m'administrer.
Cependant, les pathologies les plus handicapantes au quotidien sont la polyarthrite rhumatoïde et la fibromyalgie qui me demandent beaucoup d'adaptations pour continuer à avoir une vie la plus normale possible vis-à-vis de mes douleurs et de mes problèmes de mobilité.
Quant au SOPK, c'est la pathologie qui influe le plus sur mon moral, sur l'acceptation de soi ainsi que sur mon désir d'enfant.
Avez-vous des antécédents familiaux pour l’une de vos pathologies ?
Concernant le diabète de type 2, un facteur héréditaire est fort présent dans mon cas, il existe beaucoup de diabétique type 2 dans ma famille.
Vous sentez-vous soutenue par votre famille et vos amis ? Comprennent-ils votre quotidien avec la maladie ?
J'ai grandi avec ma polyarthrite puis les autres pathologies sont apparues à l'âge adulte. Pendant longtemps, j'ai intériorisé mes douleurs et mes difficultés, ce n'est que depuis récemment que je les exprime et les montre. Je comprends que cela puisse désarçonner certains de mes proches car ils n'y avaient pas été habitués.
Mon entourage fait tout ce qu'il peut pour m'aider, bien que j'essaye de les solliciter le moins possible. Ils sont bienveillants et c'est le principal. Malheureusement, je pense qu'il est difficile de comprendre les douleurs chroniques quand on n'y est pas confronté.
La maladie permet de faire un tri naturel. Parfois, elle nous éloigne d'une certaine normalité, de la vie à 1000 à l’heure, il est alors difficile de garder des amitiés et certains liens familiaux.
Mon compagnon est celui sur lequel je peux m'appuyer qui, au quotidien, est témoin de mes difficultés mais aussi de mes victoires. Il est celui avec qui je me sens la moins jugée et qui m'aide le plus.
Quel est l’impact de vos pathologies sur votre vie privée et professionnelle (ou scolaire) ? Quels préjugés entendez-vous fréquemment sur vos pathologies dites « invisibles » ?
Côté professionnel, l'année dernière, mes maladies ont pris le dessus. Depuis quelques années, conjuguer maladies chroniques et vie professionnelle était devenu difficile. J'ai eu beaucoup d'absences à cause de mes rendez-vous médicaux et d'arrêts maladie. Il y a eu beaucoup d’incompréhensions et de jugement sur mon lieu de travail.
J'ai, le plus longtemps possible, voulu tenir ma place à mon travail, mais c’était au détriment de ma santé et également de ma santé mentale. Je me suis battue pour essayer d'avoir un poste aménagé, de pouvoir avoir accès à un mi-temps thérapeutique mais la discussion était devenue impossible.
Au vu de cette situation compliquée et également de l’évolution des mes pathologies, de la fatigue que celles-ci engendraient, la médecine du travail m'a déclarée inapte au travail, s'en est suivi un licenciement. Je suis donc maintenant en invalidité.
Côté personnel, mes maladies influent forcément sur mes projets d'avenir, ne serait-ce que pour avoir un enfant.
Les maladies invisibles souffrent d’énormément de préjugés que ce soit dans le milieu professionnel, familial ou même médical...et ce n'est pas normal !
Quelqu'un atteint de maladies dites invisibles doit se battre pour se faire entendre, pour avoir accès à un diagnostic, et c'est fatiguant !
A tort, beaucoup de personnes ne croient que ce qu'elles voient. Elles se permettent donc de porter un jugement sur nos difficultés, notre santé…
Vous êtes active sur les réseaux sociaux et ambassadrice pour Vik et Ma Patho. Pourquoi avoir décidé de parler de vos pathologies sur Internet ? Pourriez-vous nous en dire plus quant à votre quotidien sur les réseaux sociaux ? Quels sont les retours des membres qui vous suivent ?
J'ai ouvert mon compte Instagram en 2019, lors d'une longue hospitalisation concernant mon diabète. A cette époque-là, je me sentais terriblement seule, j'ai ressenti le besoin de discuter avec d'autres personnes qui vivaient la même chose que moi. Cela m'a beaucoup aidé à accepter ce que je vivais, pour mieux vivre avec mes pathologies.
L'aventure des réseaux sociaux a commencé ainsi. Et puis, petit à petit, une petite communauté s'est créée, avec le but de s'entraider, de se soutenir et d'informer sur nos différentes maladies.
Je me suis aussi rendu compte que, dans la vie réelle ou sur les réseaux sociaux, nous étions beaucoup à subir les préjugés sur les maladies invisibles. Il m'est apparu indispensable de faire quelque chose à mon échelle pour combattre cela.
Les réseaux sociaux sont un formidable outil pour informer autour de soi.
J'ai eu la chance de devenir ambassadrice, toujours dans cet esprit de communiquer, de sensibiliser, de créer du contenu autour du handicap et des maladies chroniques et/ou invisibles.
Je mets un point d'honneur à répondre à toutes les personnes qui me sollicitent afin d'aider ou à rediriger vers des associations ou d'autres comptes Instagram lorsque je n'ai pas la réponse. Le but est d’échanger au maximum, de se soutenir.
Grâce aux réseaux sociaux, j'ai grandi des expériences et des conseils des autres warriors. J'ai beaucoup appris sur mes propres maladies et sur d'autres que je ne connaissais pas. J'ai compris qu'il était important d’être une patiente active. Je me suis dit qu'il était légitime qu'à mon tour je puisse aider d'autres personnes.
Quels thèmes abordez-vous principalement sur les réseaux sociaux ? Quels messages souhaitez-vous faire passer à vos abonnés ?
J'aborde des thèmes variés tels que le validisme, les préjuges, la santé mentale, la féminité, ainsi que tout ce qui fait le quotidien d'une jeune femme de 30 ans.
Je souhaite montrer à tous ceux qui vivent avec une ou des maladies chroniques que rien n'est impossible, qu'ils ne sont pas seuls.
Cependant, je ne souhaite pas non plus enjoliver notre quotidien. Je veux montrer, grâce à ma présence sur les réseaux, ce qu'est la réalité quand on est malade chronique. Ce n'est qu'en témoignant que l'on pourra faire changer la vision du handicap invisible.
Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Mon plus gros et mon plus beau projet personnel serait de pouvoir devenir maman.
Concernant mon engagement sur les réseaux sociaux, j'ai pour projet, dans les mois à venir, d'ouvrir un blog pour me créer un espace en plus des réseaux sociaux afin de militer contre le validisme et combattre les préjugés sur les maladies invisibles.
Enfin, quel(s) conseil(s) aimeriez-vous donner aux membres Carenity qui, comme vous, sont touchés par une ou plusieurs maladies chroniques invisibles ?
Je voudrais aussi sensibiliser les membres de Carenity sur l'importance de ne pas rester seul face à ses difficultés. Peu importe le moyen et il en existe plein : demander de l'aide à son médecin, ne pas avoir honte d'avoir un suivi psychologique, discuter sur les réseaux sociaux avec d'autres patients, se rapprocher d'une association… Il est important d'échanger avec d'autres personnes, la solitude est la pire des maladies.
Nous avons maintenant la chance d'avoir accès à beaucoup d'informations via les réseaux sociaux, Internet ou encore les associations. Je suis persuadée que pour vivre au mieux avec ses maladies, il est important d’être un patient actif et informé.
Un dernier mot ?
Ne doutez jamais de vous, vous êtes d'une force incroyable !
Un grand merci à Elodie pour avoir partagé son histoire sur Carenity !
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