Polyarthrite rhumatoïde : “J’ai dû revoir beaucoup de choses et doser mes activités pour ne pas en faire trop.”
Publié le 1 janv. 2025 • Par Claudia Lima
Carole, @GrisLoup19 sur notre forum, 60 ans, partage son expérience de la polyarthrite rhumatoïde, une maladie qui a bouleversé son quotidien. Retraitée depuis un an, elle évoque son parcours, ses traitements, et comment elle a dû réorganiser sa vie pour gérer la douleur et la fatigue.
Un témoignage inspirant sur l’adaptation face à cette maladie chronique.
Bonjour @GrisLoup19, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions.
Pouvez-vous vous présenter brièvement ?
J'ai eu 60 ans en juin 2024. Je suis à la retraite depuis un an. J'ai exercé dans le secteur public, j’étais adjointe d’établissement scolaire de 2nd degré, et dans le secteur privé en tant que directrice d’établissements médico-sociaux.
J'étais très investie dans mon travail, mais la maladie ne m’a pas permis de continuer... 50 heures par semaine... c’était impossible !
J'ai donc fait le choix d'une retraite "anticipée"... j'avais la chance de pouvoir en bénéficier. J'adorais mon travail, mais je n’ai aucun regret.
Quand et comment avez-vous reçu le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde ? Quels ont été les premiers signes ou symptômes qui vous ont alertée ?
C’était en février 2022 : le matin, j’avais des douleurs à la marche, qui disparaissent ensuite, mais qui revenaient le lendemain matin. J’avais les mains douloureuses également. Et cela continuait le surlendemain. Cela m'alerte, je prends rendez-vous chez mon médecin.
J'ai effectué des recherches sur Internet. Je découvre la polyarthrite rhumatoïde. Mes symptômes ressemblent à ce qui est décrit. Mon médecin me fait faire une prise de sang et me dit : "Souhaitons que ce ne soit pas une PR !". Je reçois et je lis les résultats en ligne sur l'écran de mon ordinateur, oui, les résultats semblent indiquer une polyarthrite rhumatoïde. Mon médecin est en congé pendant une semaine. Je suis totalement désemparée. Seule face à ce résultat.
Je voudrais qu'un médecin me confirme… ou infirme le diagnostic !! J'opte pour une consultation en visio. J'ai besoin de savoir, je ne peux pas attendre. C'est trop angoissant. Le médecin me confirme la polyarthrite rhumatoïde, il me rassure un peu. Je tente aussitôt d'avoir un rendez-vous avec le rhumatologue que j'avais déjà consulté à l'hôpital il y a plusieurs années pour mon arthrose du genou. C’est la douche froide, pas de rendez-vous avant 6 mois. Je tente alors dans la ville la plus proche, hôpital, secteur privé, même combat ! Je sais qu'une prise en charge précoce est déterminante. Il me faudra attendre de revoir mon médecin la semaine suivante, elle me rassure et surtout, m'obtient un rendez-vous 3 jours plus tard chez un rhumatologue.
Comment la polyarthrite rhumatoïde affecte-t-elle vos activités quotidiennes, qu'il s'agisse de votre travail, de vos loisirs ou de vos relations familiales ?
J'ai dû revoir beaucoup de choses. À ce jour, la maladie est "maîtrisée". Si j'ai dû arrêter de travailler, je mesure mes activités afin de ne pas en faire trop. Il faut doser. C'est comme en cuisine.
Terminé les randonnées de 4 à 5 h de marche ! Mais je ne me prive pas, je fais ce dont j'ai envie en fonction de ce que je peux. Je suis en effet très fatigable, s'ajoutent des moments d'épuisement. J'accepte, j'attends que cela passe, je fais des siestes et je me repose. Dans ces cas-là, je laisse tomber la sortie, le resto, mais c'est seulement reporté.
Reste la crainte que le traitement ne fonctionne plus. Il faut s'organiser, partir en vacances avec de la cortisone. Je n'entreprends pas de grand voyage, notamment à l'étranger. Je ne serais pas rassurée.
Quels sont les traitements que vous suivez pour gérer la polyarthrite rhumatoïde ? Les effets secondaires des traitements ont-ils été un défi pour vous ?
Je suis sous traitement Enbrel®, cela me convient très bien. Je n'ai aucun effet secondaire avec mon traitement actuel.
J’ai suivi 3 autres traitements avant celui-ci. J’ai pris du méthotrexate durant 1 an, c’était efficace sur la polyarthrite rhumatoïde, mais les effets secondaires désastreux étaient très difficiles à vivre. J’ai pris le traitement Arava®, aucun effet secondaire, mais inefficace sur la polyarthrite rhumatoïde. Et aussi, le traitement Humira®, super pendant 6 mois et c'est tout.
J’ai connu des effets secondaires vraiment très importants avec mes précédents traitements. Je prenais mon traitement le vendredi soir, j’étais malade le samedi, j’avais le dimanche pour récupérer et j’allais travailler le lundi. Une vie organisée pour "tenir au boulot". Plus de sorties, plus de loisirs… plus de vie. Un enfer !
Avez-vous essayé des thérapies alternatives, comme les changements d'alimentation, la physiothérapie, ou des techniques de relaxation, pour améliorer votre qualité de vie ?
J'ai opté pour une alimentation anti-inflammatoire de type régime méditerranéen. J'en suis satisfaite et je prends plaisir à cuisiner.
Je pratique des activités physiques tous les jours : la marche, la natation, la gym douce, le yoga adapté aux patients souffrant d’une polyarthrite rhumatoïde.
Mon sommeil est amélioré grâce à une "bonne fatigue". Aussi, des massages "bien-être" pratiqués par un kinésithérapeute m'aident à me détendre, ils ne sont pas pris en charge sécurité sociale. J’associe également le spa (je suis bien dans l’eau) avec le sauna et des séances de sophrologie aquatique. Je prends du temps rien que pour moi.
Comment la maladie affecte-t-elle votre bien-être émotionnel et psychologique, en particulier lors des poussées inflammatoires ?
Lors de poussées inflammatoires… c'est l'angoisse ! D’autant que les corticoïdes prescrits me font déprimer, j'ai des crises de pleurs incontrôlables. Je veille à effectuer des exercices de respiration afin de ne pas rester tendue. La crainte de nouvelles poussées après un éventuel échec de traitement demeure, il en résulte une forme d'hypervigilance parfois toxique ! Le risque étant de rester bloqué à s'observer en permanence !
Je m'investis dans les activités que j’aime et qui m’occupent totalement comme la généalogie, la lecture, la cuisine, le jardinage, et aussi faire du bénévolat en EHPAD.
Ressentez-vous du soutien de la part de vos proches ? Comment réagissent-ils face aux défis que pose la polyarthrite rhumatoïde dans votre vie ?
C'est une question complexe. La polyarthrite rhumatoïde est invisible. En dehors des proches qui sont au courant et ont pris l'habitude, si on n'en parle pas et qu'on ne dit pas : "Ça ne va pas DU TOUT, je suis VRAIMENT TRÈS fatiguée, vraiment mal, je souffre beaucoup...", les autres ne verront rien. La fatigue et la douleur sont souvent perçues comme des maux courants, comme un mal de dos. Il est donc important de dire les choses et d'expliquer.
Parlez-vous facilement de votre maladie ? Avez-vous été confrontée à des malentendus ou à des préjugés à cause de votre polyarthrite rhumatoïde, et si oui, comment réagissez-vous ?
J'évoque "ma" polyarthrite rhumatoïde très facilement et sans aucune gêne. Je l’explique si l’on me questionne, quand cela semble pertinent. Je précise que non, ce n'est pas une maladie de personnes âgées ! Je dis que c’est une maladie inflammatoire, chronique, auto-immune, qui ne se guérit pas et peut être grave si elle n'est pas maîtrisée, avec des traitements pas toujours très sympas ! Ça fait beaucoup à assimiler et ce n’est pas forcément très fun !
Il faut du temps pour expliquer, les gens n'ont pas toujours le temps, ni l'envie d'écouter ou ils n'osent pas, ne veulent pas sembler indiscrets ou curieux.
En tant que patient atteint d'une polyarthrite rhumatoïde, on a parfois l'impression d'être un usurpateur, de ne pas être pris au sérieux, d’être incompris. Non, ce n'est pas une fatigue qui va se régler le temps d’un week-end, le temps des vacances ou quand on dormira mieux... La fatigue due à la polyarthrite rhumatoïde, je ne la souhaite à personne !
On se sent rassuré quand quelqu'un vous dit : “J'ai un ami qui a une polyarthrite rhumatoïde”. Parce qu’enfin quelqu'un sait de quoi il est question !!
On voudrait parfois pouvoir partager davantage. Dans ce cas, je pense qu'il ne faut pas hésiter à consulter un psychologue. Je l'ai fait, cela m'a aidée. Encore une fois, il ne faut pas hésiter à dire les choses. Quelqu'un peut-il essorer la salade ? Je ne peux pas !
Comment envisagez-vous l'avenir avec la polyarthrite rhumatoïde ? Quels sont vos objectifs pour maintenir ou améliorer votre qualité de vie ?
Mon parcours du combattant a commencé en 2022. Rien n'est acquis, rien n'est gagné. Je dois mettre toutes les chances de mon côté, suivre mon traitement avec régularité, garder une bonne forme physique, bien manger, bien dormir. Être bien, ne rien lâcher ! Enfin, parfois, on lâche, mais c’est normal. Alors, on se reprend !
En fonction de l'âge que l'on a, l'avenir se présente bien sûr différemment. En ce qui me concerne, une polyarthrite rhumatoïde à 58 ans, c'est une chance. J'ai eu des enfants, une vie bien remplie. L'inconvénient, c'est que la polyarthrite rhumatoïde arrive en même temps que les douleurs d'arthrose et compagnie ! La vieillesse, quoi ! C'est pour moi une raison de plus pour garder la forme.
Quels conseils donneriez-vous à d'autres personnes qui viennent d'être diagnostiquées avec la polyarthrite rhumatoïde pour les aider à gérer leur quotidien ?
Il faut être acteur de sa prise en charge, chercher ce qui nous convient et ce qui nous fait du bien ! Faire confiance à la médecine, ne pas abandonner, mettre toutes les chances de son côté, en parler ! Et toujours avoir des projets ! À sa mesure...
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