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Fibromyalgie : "Écoute ton corps, ne le force pas, ce que tu as pu faire aujourd'hui est suffisant"

Publié le 27 juil. 2022 • Par Andrea Barcia

Nuria, NuriMon sur la plateforme Carenity en Espagne, souffre, entre autres, de fibromyalgie et de fatigue chronique.

Pour Carenity, elle évoque la façon dont elle a découvert sa maladie, son quotidien avec celle-ci, sa relation avec ses proches et le suivi de ses symptômes et de ses traitements. 

Découvrez vite son histoire ! 

Fibromyalgie :

Bonjour Nuria, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions.

Tout d'abord, pouvez-vous nous en dire plus sur vous ? 

Pour commencer, je vous remercie de m'avoir donné cette opportunité de m'exprimer et ce soutien.

J'ai 43 ans, je suis mère de deux adolescents de 16 et 14 ans, le plus jeune est un garçon transsexuel. Je me suis remariée à un homme extraordinaire et ils sont ma force motrice dans la vie. Ah, et aussi nous avons un ami canin de presque 10 ans, Miko, qui est à la fois notre joie et notre cauchemar, car il est très câlin.

Née au Pays Basque, j'ai ensuite vécu en Cantabrie. Mes parents sont castillans, tous deux infirmiers à la retraite. J'ai une sœur de 3 ans plus âgée que moi, psychologue de profession.

J'aime la nature, les animaux, la mer (son odeur et son bruit me calment), le "Street-Rock" des années 80 avec les groupes Barricada, Barón Rojo, Extremoduro... J'aime aussi lire, écrire et dessiner. Mais par-dessus tout, j'aime être avec ma famille et la voir heureuse. Je suis une personne aux goûts simples, empathique, affectueuse, stricte aussi, avec un mauvais caractère, seulement si on me provoque.

Je suis fan d'art également, en fait j'ai une licence en histoire de l'art, un BTS en arts de la sculpture appliqués au bois et j'ai un doctorat d'aptitude à la recherche en art.

Je déteste le mensonge, l'hypocrisie, les faux-semblants, l'attitude supérieure de certaines personnes et le fait d'être condamné sans jugement.

Vous souffrez de fibromyalgie et de fatigue chronique, pouvez-vous nous dire comment la maladie s'est manifestée dans votre vie ? Quels ont été les premiers symptômes ? 

Bien que j'aie été diagnostiquée à l'âge de 37 ans, la fibromyalgie m'est apparue très clairement lorsque j'en ai entendu parler pour la première fois à l'âge de 20 ans. Ce qui a été une surprise, c'est la fatigue chronique et les autres "petits amis" de la fibromyalgie.

Mon parcours a commencé à l'âge de 13 ans avec des problèmes aux mains, même si en réalité tout a commencé avec la puberté. À 14 ans, je me suis blessée au pied gauche, au niveau de l'articulation du tarse et du métatarse. J'en souffre encore aujourd'hui. À 16 ans, ce sont mes hanches, bursite du grand trochanter qui est devenue chronique. Depuis lors, je ne me souviens pas d'un seul jour de ma vie sans douleur, en fait j'étais un bébé et un enfant chétif. Cependant, mes parents, infirmiers je le rappelle, ne m'ont jamais cru et aujourd'hui, bien que je sois dépendante de niveau II, gravement handicapée avec 75 % d'invalidité permanente, titulaire d'une Carte Mobilité Inclusion et en fauteuil roulant ; je marche dès que je peux en poussant le fauteuil ; ils ne me croient toujours pas et ont honte de m'accompagner avec mon fauteuil.

Lorsque l'on est jeune, on fait quelques "bêtises" (choix) parce qu'on pense qu'on va dominer le monde. Comme travailler plus de 16h par jour en restauration pendant mes vacances universitaires, mes deux grossesses, l'éducation de mes enfants avec pour eux aussi des particularités de santé depuis leur naissance, etc. Au fil du temps, ces "bêtises" n'ont cessé de s'accumuler jusqu'à ce que mon corps et mon esprit se brisent. Combien de fois ai-je travaillé en boitant, en rampant le long du bar tout au long de la journée ? Mais il est arrivé un moment où je n'en pouvais plus, je n'avais plus de batterie, je ne pouvais plus marcher, penser ou parler. Mon mari en a eu assez que personne ne s'occupe de moi et a déposé 8 plaintes d'affilée jusqu'à ce qu'on me donne un diagnostic et qu'on arrête de me donner des médicaments sans savoir pourquoi.

Le diagnostic, même s'il était attendu, n'en était pas moins douloureux et choquant. Et il y avait tellement de choses que je me sentais submergée, je coulais. La liste : intolérances alimentaires, migraines, céphalées de tension, arthrose des hanches en plus de la bursite, maladie de Hashimoto, diagnostiquée à l'âge de 33 ans, fatigue chronique et enfin dos assez malmené du cou au coccyx.

J'ai vu beaucoup de médecins, j'ai eu beaucoup d'informations, mais peu de solutions. Avec les premiers traitements, nous avons découvert que j'avais un syndrome de sensibilité chimique multiple, ce qui limite considérablement les mesures qui peuvent m'aider.

Qu'est-ce qui vous a amené à demander de l'aide ? Combien de temps a-t-il fallu pour que le diagnostic de ces deux maladies soit posé ? Combien de médecins avez-vous consulté et quels examens médicaux avez-vous fait ? 

Ce qui m'a amenée à demander de l'aide, c'est une série de facteurs tels que le fait de me voir écroulée seule dans la rue et de continuellement demander secours à des inconnus, de devoir m'occuper de deux enfants, de subir la pression de mon mari, de ne pas pouvoir faire face à tant de douleur et de peur. J'ai constaté et je le constate encore plus tous les jours que mon cerveau palpite à l'intérieur de mon crâne, que je ne suis pas capable de suivre une conversation ou de m'en souvenir, que je ne suis pas capable de mettre des mots sur ce que mon esprit pense, tout cela me causant un épuisement physique et mental extrême... L'anxiété, due à l'absence de réponses à tout ce qui m'arrivait, n'a cessé de croître jusqu'à ce que je fasse des crises où je pensais mourir, le psychologue m'a diagnostiqué un trouble de l'adaptation chronique, c'est-à-dire une anxiété et une dépression chroniques.

Lors de ma deuxième consultation en médecine interne et au vu des analyses, la pose de mon diagnostic a été très rapide, tout était clair. Il y a eu peu d'explications, mais beaucoup d'empathie et un désir élevé d'améliorer ma qualité de vie. Cet interniste était magnifique mais il a pris sa retraite. Il m'a envoyé en rhumatologie, en rééducation, en neurologie, en neurochirurgie, en unité de gestion de la douleur, en psychiatrie, en psychologie, médecine digestive.

J'avais déjà vu ces derniers en 2013 pour le diagnostic du syndrome du côlon irritable. Aussi, à 33 ans, j'ai été suivi par un endocrinologue, un gynécologue, un kinésithérapeute... J'ai passé des échographies, des radiographies, des IRM, des télémétries, des électromyogrammes et ce n'est pas fini.

Cependant, personne ne me donne de réponse claire pour améliorer ma qualité de vie, une personne sincère devrait pouvoir te dire la vérité ! Nous ne savons pas vers qui nous tourner, certains persistent à ne pas me croire alors même qu'ils voient que je ne peux à peine bouger.

Comme vous me l'avez expliqué vous-même, votre cas clinique est " un peu " complexe, quels autres problèmes ou maladies avez-vous en plus de la fibromyalgie et de la fatigue chronique ? Sont-ils tous liés à la fibromyalgie ? 

J'ai déjà mentionné certains d'entre eux.

Beaucoup sont directement liés à la fibromyalgie et/ou à la fatigue chronique. J'ai également des intolérances alimentaires, les ovaires polykystiques, des problèmes cognitifs, une insomnie chronique, des problèmes de peau, une hypersensibilité au bruit et à la lumière, un brouillard mental, des douleurs inexpliquées, les ganglions enflés, un polype dans la gorge qui sera enlevé en juillet prochain, des vertiges... et bien sûr, des états anxieux et dépressifs dans lesquels j'ai tendance à tomber.

"Qui peut vivre 30 ans de souffrance sans être cru, écouté ou entendu, voir ses capacités diminuer de plus en plus et ne pas finir par être angoissé ?"

J'ai en plus des lésions qui ne sont pas nécessairement la cause directe d'une de mes deux maladies comme la polyarthrose de mes deux mains, le manque de croissance du cubitus, l'écrasement de plusieurs disques, les protusions discales, l'arthrose des hanches, l'hypertrophie des ligaments jaunes, le syndrome des facettes articulaires.

Personne ne sait vraiment si tout est lié, ce qu'ils savent, c'est qu'il n'est pas normal que mon corps ne guérisse pas, même d'une entorse, ou que je souffre de problèmes de cicatrisation et d'allergies aux piqûres de moustiques, par exemple.

"Ils savent que ce n'est pas normal, mais ils ne savent pas pourquoi cela m'arrive."

Les médecins ne savent pas quoi faire de moi au point de me dire qu'ils n'osent pas me vacciner contre la Covid-19 car avec les données existantes, ils ne sont pas en mesure de savoir si j'aurai des effets secondaires et quelle sera leur gravité.

Il y a un vrai manque de recherche et ils devraient se rappeler qu'ils ont affaire à des patients, pas à des maladies.

Quel est votre traitement actuel ? En êtes-vous satisfaite ? 

Ma journée commence avec plusieurs comprimés : Euthyrox, Oméprazole, Hydroclodexidine, Naproxène sodique et Nolotil, il est rare que je puisse en prendre moins. Parfois, je prends du Diazepam, cela dépend de mon niveau d'anxiété et/ou de la quantité de sommeil que j'ai eue cette nuit-là. En cas de migraines, je prends Zomig. Le soir, en plus des autres je prends Noctamide.

Cela me fait un minimum de 19 comprimés par jour. En plus de tout cela, tous les 3 jours, j'ai des patchs de Fentanyl, une fois dans le mois une ampoule de vitamine D et plusieurs crèmes pour la peau. Tous ces médicaments me rendent très constipée, je dois donc prendre Digedryl quand ce n'est plus gérable.

Si j'en suis satisfaite ? Ces médicaments me permettent de sortir de mon lit même si le niveau de douleur reste élevé. Cette année, du 23 mars au 4 avril, j'ai reçu de la lidocaïne en intraveineuse, une fois les effets secondaires passés, l'objectif principal qui était de réduire mes douleurs n'a pas été atteint.

Je sais que c'est beaucoup de médicaments, j'ai essayé plusieurs fois de les réduire mais la douleur est si intense que je ne peux pas la supporter.

"Il y a longtemps, j'ai décidé d'avoir une qualité de vie, ma qualité, plutôt que la quantité de vie."

Comment gérez-vous votre quotidien avec vos maladies et vos complications ? Avez-vous bénéficié de conseils ? Souhaitez-vous les partager ? 

La gestion quotidienne est compliquée, en raison de mes maladies et de mes limites mais aussi parce que ma belle-mère est très malade, incontinente et dépendante depuis trois ans déjà, et mes enfants ont aussi leurs problèmes de santé.

Nous louons une maison de deux étages. Quelques mois avant que ma belle-mère ne tombe dans le lit, nous avons dû mettre des matelas sur le sol du salon car il m'était déjà impossible de monter et de descendre les escaliers jusqu'à la chambre. Ce qui devait être une solution temporaire pendant que nous cherchions un autre endroit pour vivre, s'est transformé en quelque chose de permanent car mon mari est enfant unique et le seul à pouvoir la prendre. Nous vivons donc ainsi depuis plus de trois ans, nous dormons à même le sol du salon. Je ne monte presque jamais à l'étage et mes enfants sont en charge de l'entretien de la maison pour la garder décente. Dieu merci, ce sont des enfants très empathiques qui font tout ce qui doit être fait, que ce soit la cuisine, le nettoyage ou même m'aider à me doucher.

Nous vivons au rythme du de mon calendrier médical. Chaque matin, lorsque je me réveille, selon si j'ai réussi à dormir, j'évalue mon état actuel, ce que je dois faire et ce qui peut attendre. J'ai besoin d'aide pour tout ; pour m'habiller, me laver, manger, me lever, je ne peux pas sortir seule pendant cinq minutes, je ne peux même pas faire mes ongles ! Chaque jour est un nouveau défi, le peu que j'arrive à faire m'épuise et j'ai besoin de m'allonger. Le lit est l'endroit où je fais presque tout et où je passe la plupart de la journée.

Je ne me fixe plus d'objectifs, je vais aussi loin que possible et je suis fière de pouvoir le faire, le simple fait de sortir du lit est un défi.

"Je pense que c'est le meilleur conseil que je puisse donner : écoutez votre corps, ne le forcez pas, ce que vous avez pu faire aujourd'hui est suffisant, pensez à ce que vous avez accompli et non à ce qu'il vous reste." 

Vous avez mentionné que vous preniez des compléments alimentaires, lesquels ? Quels bénéfices pensez-vous qu'ils vous apportent ?

En ce moment, je ne prends pas de compléments alimentaires.

J'ai pris du tryptophane, du Coenzyme Q10, du Multicentrum pour femmes et es graines de chia que j'ai cessé parce qu'elles se coinçaient dans mes gencives. Le reste je l'ai arrêté parce que lors d'une analyse de sang j'avais un surdosage.

Il ne me reste que l'ampoule de vitamine D une fois par mois.

Je n'ai pas vraiment remarqué de bénéfices, pour être honnête, mais l'interniste m'avait conseillé d'en prendre alors nous avons essayé avant de commencer le traitement médicamenteux. Je n'ai pas eu de chance et voilà dans quel état je suis sous traitement.

Vous pratiquiez un sport ? Combien de temps l'avez-vous pratiqué ? Quels étaient les avantages du sport dans votre vie quotidienne ? 

De mes 3 ans à ma première grossesse, soit mes 25 ans, j'ai pratiqué du judo, un sport très complet recommandé par l'Unesco mais c'est un sport d'impact, il ne m'est plus possible de le pratiquer.

J'ai toujours aimé plonger et nager, alors à 16 ans j'ai commencé à aller à la piscine. La natation, si on sait bien nager, est un sport formidable où tous les groupes musculaires en profitent et, en plus, c'est un sport qui soulage. Ces dernières années, ça a été une horreur de s'habiller et de se déshabiller, ça m'épuisait, et depuis la pandémie, nous ne sommes pas retournés à la piscine. J'espère pouvoir m'y remettre, peut-être lorsque mon mari pourra nous y emmener, nous ne pouvons pas laisser ma belle-mère et je ne peux pas conduire plus de 10 minutes.

Dans l'eau, je me sens libre, moins lourde, je ne ressens presque aucune douleur, mais en sortir est une autre affaire. Cela me manque beaucoup et j'aimerais m'y remettre. Au bon vieux temps, je faisais 80 longueurs en une heure. Les dernières fois, je me suis fixé un temps, 30 minutes, et si des fois, je pouvais faire 20 longueurs, c'était tant mieux, mais si quelques fois je ne pouvais en faire que 5, c'était tant mieux aussi, l'important était d'y aller, de bouger et d''essayer. Un jour viendra où je pourrai le faire à nouveau.

Vous avez démontré de l'intérêt pour les médecines alternatives Qu'est-ce qui a suscité cet intérêt et comment pensez-vous qu'elles peuvent vous aider ? 

Mon intérêt pour les traitements alternatifs est venu du besoin de me sentir mieux tout en maltraitant le moins possible mon corps. Malheureusement, une fois de plus, rien n'a fonctionné pour moi. J'ai essayé l'acupuncture, le tai chi et rien. J'ai essayé l'huile de CBD, la marijuana sans THC et avec THC. Fumée vapotée, macérée dans l'huile d'olive ou infusée dans du lait d'amande. Lorsqu'il n'y a que du CBD, cela ne me fait rien, celui qui contient du THC me fait me sentir mal. J'ai l'impression que je vais mourir.

J'ai également consulté des kinésithérapeutes et des ostéopathes, mais les séances génèrent beaucoup de dégâts non compensés par le bénéfice tiré de celles-ci, qui est nul. Pour reprendre les termes de l'un des ostéopathes que j'ai consultés et d'un autre kinésithérapeute que j'ai consulté, "Mon corps est trop endommagé pour que je puisse en tirer un quelconque avantage".

Quelle est votre relation avec vos proches ? Comment expliquez-vous vos maladies à votre famille ? Vous comprennent-ils ? Êtes-vous soutenue ?

Ma famille proche, à savoir mes enfants, mon mari et mes beaux-parents, eh bien ils ne comprennent rien les pauvres, ils m'aident, ils m'écoutent, ils me soutiennent, ils ne doutent pas, ils ne me jugent pas, ils m'encouragent dans ce que je fais, même quand c'est peu. Je n'ai pas besoin de leur expliquer quoi que ce soit, ils le vivent tous les jours et, bien qu'ils ne ressentent pas la douleur physique dans leur propre corps, c'est tout comme.

La fibromyalgie, c'est comme vivre avec la grippe tous les jours, quand chaque centimètre de votre corps vous fait mal, quand quoi que vous fassiez, quelle que soit votre position, vous ressentez toujours une douleur à un endroit ou à un autre. La fatigue chronique, c'est comme un jouet qui n'a plus de piles, à chaque fois plus lent jusqu'à ce qu'il s'arrête complètement. Pas seulement sur le plan physique, mais aussi sur le plan cognitif, parce que même penser vous épuise et parler est une torture, un effort si grand que même si vous le vouliez, votre voix ne peut pas sortir de votre gorge.

Mes parents et ma sœur ne comprennent pas et ne veulent pas comprendre. Ma mère se compare à moi dans la douleur, sauf que j'ai 25 ans de moins qu'elle. J'ai essayé de leur expliquer, je leur ai montré les rapports médicaux, les examens d'imagerie, la notification de dépendance et d'incapacité et de handicap... mais selon eux, tout est dans ma tête. J'invente parce que j'aime attirer l'attention et je vole l'enfance de mes enfants. De nombreuses méchancetés ont été dites, beaucoup trop. Les cordonniers sont toujours les plus mal chaussés. Pour eux, soit vous êtes atteint d'une maladie en phase terminale, soit vous n'avez rien. Je dois apprendre à vivre avec la douleur et arrêtez de me plaindre parce que tout est dans ma tête et dans ma façon de gérer.

D'un autre côté, j'ai des amis et des cousins qui, sans comprendre toute l'ampleur et l'impact de ces maladies sur ma vie, n'hésitent pas, m'écoutent, essaient de m'aider, font preuve d'empathie et de réconfort et me font rire.

Quel est l'impact de la maladie sur votre vie privée et professionnelle ? 

L'impact sur ma vie... brutal ! Vous vivez emprisonné dans un corps qui ne vous donne que de la peine et de la douleur 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, il n'y a pas de répit. Votre corps est votre geôlier privé qui vous suit partout, vous n'avez même pas d'intimité pour uriner.

Je ne peux pas travailler sur quelque chose de physique, je ne peux pas non plus travailler sur quelque chose qui demande un effort mental. Je ne peux pas rester dans la même position plus de quinze minutes. Il y a des jours où je ne me souviens pas de conversations, ou je ne comprends pas ce qu'on me dit comme si on me parlait dans une langue étrangère. Il y a des jours où mes mains et mes doigts me font tellement mal que je ne peux pas écrire. Parfois, je suis submergée par des vertiges quand je bouge la tête ou change de position.

Dans la sphère privée, le moindre changement d'humeur peut me contrarier, à tout moment il peut y avoir un déséquilibre émotionnel et mon corps me le fait payer. Avec mon mari, nous nous sommes adaptés et nous avons appris à nous amuser autrement.

J'adore la plage, mais je ne peux plus marcher sur le sable. Je dois donc anticiper les lieux de déplacement, connaître les endroits qui ont des ports, des esplanades cimentées et qui sont à la fois attrayants pour les enfants et faciles d'accès aux sanitaires pour moi. Les promenades dans la nature font partie du passé.

La dépendance est très difficile à accepter, surtout quand on est jeune, mais on n'a pas d'autre choix que de le faire, sinon on sombre dans la tristesse. Je ne nie pas que c'est difficile et qu'il y a des rechutes, mais il faut se battre contre son esprit tous les jours.

Le problème se pose lorsque vous ne pouvez pas planifier de sorties avec vos amis de peur de devoir annuler le jour même. Où vous en planifiez quand même et ce jour-là vous ressemblez plus à un cadavre qu'à une personne. Vous ne pouvez pas vous déplacer à Navarre pour le week-end de mariage de votre cousin. Pour la communion de votre neveu, vous devez passer dix jours au lit. Vous ne pouvez pas aller au restaurant parce que vous ne pouvez pas rester assis longtemps et vous finissez par vous allonger dans la voiture ou vous annulez tout simplement.

Avec cette maladie, chaque jour est une loterie, on ne peut jamais savoir si la journée sera bonne ou pas, si on pourra parler ou pas, si on pourra marcher ou pas.

Vous êtes l'un des membres ambassadeurs de Carenity, pourquoi avez-vous accepté d'être membre ambassadeur et quel impact souhaitez-vous avoir sur les forums de Carenity ? 

J'ai accepté d'être membre ambassadeur parce que je trouve que c'est un honneur, avoir ses opinions valorisés à ce point est très gratifiant. 

Le plus grand impact que j'aimerais avoir est d'aider mes collègues sur cette plateforme ; si mes idées, mes expériences et mes réflexions servent à aider quelqu'un à mieux se comprendre, à aller de l'avant, aussi difficile que cela puisse paraître, à réapprendre à s'aimer, je pense que j'aurai accompli quelque chose de bien. En même temps, cela m'aide à mieux me connaître, à m'apprécier davantage, à me défouler et à me sentir mieux.

"Carenity est devenue une étrange famille où je me sens libre d'être moi-même et où je me sens valorisée, crue, soutenue. C'est une grande aide dans mes journées." 

Je pense que ce type de plateforme est très nécessaire, on peut trouver des personnes qui sont dans une situation similaire, on peut voir que l'on n'est pas la seule personne au monde à souffrir comme ça et on se sent plus soutenu, on peut trouver de bonnes idées pour améliorer son quotidien. Et lorsque vous aidez les autres, vous semblez oublier un peu vos propres problèmes et cela vous fait du bien émotionnellement. En parlant de votre expérience personnelle, vous pouvez vous défouler, vous vous sentez mieux et le reste c'est du bonus.

Souvent, les patients atteints de maladies peu connues en savent plus que les médecins eux-mêmes et, en tant qu'êtres humains, le sentiment d'appartenir à un groupe nous donne l'impression d'être plus protégés, plus soutenus.

Quels sont vos projets pour l'avenir ? 

Le projet le plus urgent est de déménager dans une autre maison avant la fin de l'année. Ensuite, ce serait de voir mes fils devenir des adultes, de faire en sorte qu'ils soient de bonnes personnes et qu'ils soient heureux.

Et je veux rire davantage, profiter de ce combat quotidien que nous menons depuis quatre ans maintenant.

Quels conseils donneriez-vous aux patients qui se trouvent dans une situation similaire à la vôtre ? 

Je leur dirais : "Oublie ton ancien toi !"

Apprenez à aimer le nouveau vous, reconnaissez-vous, estimez-vous, aimez-vous. N'ayez pas honte de demander de l'aide, regardez-vous dans le miroir et dites-vous que vous allez garder la face, accepter la réalité et que vous êtes en vie, nécessaire, digne d'amour et de compréhension.

Ne faites pas de plans trop lointains. Concentrez-vous sur le présent. Ne vous mettez pas au défi, vous avez maintenant de nouvelles limites et vous devez les découvrir. Débarrassez votre vie de toutes les personnes qui sont toxiques pour vous et, si vous ne pouvez pas vous en débarrasser complètement, apprenez combien vous pouvez donner, ce qu'ils sont prêts à vous donner et ce que vous êtes prêt à recevoir.

"Tu es toujours une belle personne et ta famille a toujours besoin de toi, n'oublie pas, nous ne sommes pas une maladie, nous sommes des personnes qui souffrent d'une maladie, mais nous sommes bien plus que cela."

Un dernier mot ? 

Juste MERCI !

Un grand merci à Nuria pour son témoignage !     
   

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avatar Andrea Barcia

Auteur : Andrea Barcia, Rédactrice santé

Andrea est spécialisée dans la gestion des communautés des patients en ligne et dans la rédaction d’articles santé. Elle a une appétence particulière pour les domaines de la neuropsychologie, de la nutrition et du... >> En savoir plus

4 commentaires


Bigirimana
le 27/07/2022

Bonjour Nuria,

J'ai lu votre témoignage avec des larmes aux yeux. Tu as raison dans tout ce que tu dis, il faut profiter la vie d'aujourd'hui comme si demain ne nous appartenait pas.

Courage, on te souhaite de voir tes fils grandir et mener une belle vie comme tu le souhaites.

Bonne journée


nathippie
le 28/07/2022

La fibromyalgie ,c'est enfin reconnu ,provient d'un stress traumatique ,souvent oublié .ce trauma ,engendre trop de connexions dans l'insula d'où le dérèglement des neurotransmetteurs à la douleur. Quand on pense avoir tout essayé ,il est bénéfique de consulter un BON psy avec qui on fera le chemin de l'enfance jusqu'à la survenue de cette pathologie qui n'est absolument pas psychosomatique .


Dolores3
le 28/07/2022

Bonjour Nuria

Merci beaucoup pour votre témoignage je m’y retrouve tellement je vous comprend et je suis de tout cœur avec vous

vous êtes une femme très forte

courage



nathippie
le 28/07/2022

Petit conseil concernant les compléments alimentaires: les Oméga 3 très dosés en EPA (au moins 1,5g par jour) sachant que la plupart des dérèglements sont dû à un processus inflammatoire. Sur le net voyez " bienfaits des omégas 3"

Très utile, quand on s'énerve facilement et à juste raison dans cette maladie , ,ça marche bien.

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