Maladie de Crohn : “Cette maladie, même si elle touche une sphère très intime, ne doit pas être une honte !”
Publié le 6 nov. 2024 • Par Candice Salomé
Marion, dite la_crohnasse sur Instagram, est atteinte de la maladie de Crohn depuis bientôt 10 ans. Ses premiers symptômes lui ont valu une importante perte de poids, une anémie et une dénutrition. Son médecin généraliste de l’époque l’avait cataloguée comme étant anorexique et ne lui a pas fait faire d’examens.
Après en avoir changé, elle a finalement été diagnostiquée de la maladie de Crohn et a pu essayer plusieurs traitements avant de trouver celui qui a su mettre la maladie sous silence.
Découvrez vite son histoire !
Bonjour Marion, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions.
Tout d’abord, pourriez-vous nous en dire plus sur vous ?
Je m’appelle Marion alias La Crohnasse sur les réseaux sociaux, j’ai 37 ans et je suis atteinte de la maladie de Crohn depuis bientôt 10 ans maintenant.
Dans la vie, je suis assistante commerciale et communication et j’exerce une activité complémentaire de comportementaliste félin à mon compte depuis 3 ans. Passionnée de handball depuis mes 11 ans que je pratique depuis 20 ans, et ce, malgré mon handicap !
Vous êtes atteinte de la maladie de Crohn. Pourriez-vous nous dire quelles ont été les premières manifestations de la maladie ? Qu’est-ce qui vous a poussée à consulter ?
Suite à un gros choc psychologique à l’été 2014, j’ai commencé à ressentir une énorme douleur au ventre qui m’empêchait de me tenir droite, les médecins 24/24 était alors intervenus à mon domicile sans trop diagnostiquer quoi que ce soit…
Par la suite, j’ai eu de plus en plus de douleurs, comme des couteaux qui cisaillaient mon ventre de jour comme de nuit, j’ai perdu énormément de poids, j’étais anémiée, dénutrie… Mon généraliste à l’époque me soupçonnait d’être anorexique… J’ai passé de longs mois à tenter de lui expliquer que ce n’était pas le cas sans qu’il ne m’écoute…
Combien de temps s’est écoulé entre vos premiers symptômes et le diagnostic ? Combien de médecins avez-vous dû rencontrer et quels examens avez-vous dû passer pour recevoir le diagnostic ?
J’ai fini par changer de médecin traitant en novembre 2014. Immédiatement, la nouvelle généraliste, au vu de mes symptômes, a suspecté une maladie de Crohn.
Rendez-vous d’urgence chez une gastroentérologue, échographie abdominale qui ne laissait que peu d’espoir sur un diagnostic plus « léger », coloscopie, naso-gastroscopie en janvier 2015 et verdict sans appel : je suis ulcérée à partir de la partie terminale de l’intestin (iléon) de manière sévère…
Le diagnostic ferme est alors posé et nous commençons les traitements…
Quelle est votre prise en charge et vos traitements actuels ? Vous conviennent-ils ? Avez-vous essayé plusieurs options thérapeutiques avant de trouver la bonne ?
Nous avons commencé le traitement par de la cortisone à haute dose pour calmer rapidement l’inflammation ainsi que de l’Imurel en parallèle.
Au bout de deux mois, l’Imurel n’étant pas assez efficace pour pouvoir effectuer une décroissance de la cortisone, nous sommes passés en plus sur de l’Humira.
Un an plus tard, j’ai dû contrôler en coloscopie l’état de mes intestins, je n’étais pas en rémission, il a alors été décidé de cesser l’Imurel et d’augmenter la dose d’Humira à une piqure par semaine.
J’ai alors changé de gastroentérologue pour celui qui me soigne actuellement.
Suite à un lupus induit par Humira qui m’a causé de nombreuses douleurs durant 8 mois, ce dernier a décidé de changer pour Stelara en juin 2018.
Depuis, je suis en rémission complète.
Pourriez-vous nous décrire les symptômes de la maladie de Crohn ? Quel est son impact sur votre vie privée et professionnelle ?
Les symptômes sont parfois bien différents d’un malade à l’autre mais, chez moi, ils se manifestent principalement par d’énormes douleurs au ventre, beaucoup d’aller-retours aux toilettes en poussées, une perte de poids importante, beaucoup de fatigue aussi, une perte d’énergie en général… J’ai aussi eu, bien avant mon diagnostic, des douleurs articulaires qui avaient orienté les médecins vers une maladie articulaire de type SPA (spondylarthrite ankylosante) ou PR (polyarthrite rhumatoïde)…
Auriez-vous des conseils, trucs et astuces pour mieux vivre avec la maladie de Crohn ?
Je crois sincèrement qu’il n’y pas de miracles avec cette maladie, il est important de l’accepter, de se dire que c’est une part de nous qui ne nous définit pas mais qui est bien présente, de tester ce qui nous fait du bien, ce qui passe ou non en termes d’alimentation et surtout : d’être bien dans sa tête et ses baskets !
Nos intestins sont directement reliés à notre cerveau via le nerf vague, il n’y a donc pas de secret : quand la tête va, tout va (ou presque !) ! Quoi qu’il en soit, cette maladie, même si elle touche une sphère très intime, ne doit pas être une honte !
Depuis votre diagnostic, qu’est-ce qui a changé dans votre quotidien ?
Avant mon diagnostic, je n’allais que très rarement chez le médecin. Depuis, je dois composer entre ma vie personnelle, professionnelle et mes rendez-vous médicaux. Cela nécessite forcément une organisation différente et donne l’obligation de faire certains choix, économiser son énergie et la focaliser sur le principal. Je pense être passée plusieurs fois près de la mort depuis mon diagnostic et, désormais, je me dis que le quotidien doit être le moins possible subit mais qu’il est nécessaire de profiter de la vie comme elle vient !
Vous vous êtes lancée sur Instagram sous le nom La_crohnasse. Vous y parlez de la maladie, mais pas que ! Pourquoi avoir décidé de parler de la maladie sur Instagram ? Quel(s) message(s) désirez-vous faire passer à vos abonnées ? Quels autres thèmes abordez-vous ?
Lorsque j’ai été diagnostiquée, j’ai d’abord eu un terrible contrecoup… Mais si je me suis, au départ, renfermée, j’ai ensuite assez rapidement cherché des gens qui, comme moi, devaient composer avec la maladie. J’ai ainsi rencontré énormément d’autres malades sur les réseaux sociaux, dont certains sont devenus de vrais amis aujourd’hui !
Quand j’ai constaté la solitude de certains malades à leur contact, je me suis dit qu’il était important de véhiculer un message sur les MICI, quelque chose de positif, pour que les malades ne se sentent plus seuls, et qu’ils puissent constater que, même atteints d’une MICI, tout est possible et sans honte ! La vie ne s’arrête pas à une pathologie, il y a de belles choses à voir, de belles personnes à côtoyer, et des petits bonheurs qui valent la peine !
Que pensez-vous que les réseaux sociaux et autres forums santé apportent aux patients dans la gestion de leur(s) maladie(s) ? Est-ce important, selon vous, d’être informé sur ses pathologies ? Si oui, pourquoi ?
Je crois fermement qu’il est important d’informer les malades mais aussi et surtout les « bien portants » sur les handicaps invisibles. Il y a encore aujourd’hui beaucoup trop d’oublis sur ce que peut être réellement un handicap. Nous ne portons, en effet, pas de traces physiques de notre handicap, mais il est pourtant bien présent et il n’est pas moins important parce qu’il est invisible.
Sans compter qu’aujourd’hui, et le constat est bien triste, beaucoup de patients sont « lâchés dans la nature » à leur diagnostic sans qu’on ne leur explique quoi que ce soit de ce qui leur arrive, par manque de temps, de personnel…
Et finalement, les mieux placés pour en parler restent les malades eux-mêmes !
Quels sont vos projets pour l’avenir ?
J’ai pris énormément de distance avec les réseaux sociaux « en public » ces dernières années, privilégiant les échanges en message privé à ceux qui le souhaitent. Je n’en suis pas moins présente pour ceux qui souhaitent échanger et c’est toujours un réel plaisir. L’objectif reste, quoi qu’il en soit, d’aider un maximum de patients avec leur pathologie, d’autant plus tant que la mienne est en sommeil. J’ai toujours la volonté d’apporter mon soutien et mes conseils à n’importe quelle personne qui me solliciterait et je continuerai de le faire tant que mon aide est nécessaire !
Qu’aimeriez-vous conseiller aux membres Carenity également touchés par la maladie de Crohn ?
Écoutez-vous, faites des choses qui vous apportent du bonheur et dites-vous que rien n’est impossible. Prenez exemple sur des gens qui ne se sont pas arrêtés de vivre à leur diagnostic (Vogue avec un Crohn, Athletewithstoma, et tant d’autres qui sont de vraies sources d’inspiration au quotidien !) et dites-vous que même lorsqu’on semble ne pas voir de lumière au bout du tunnel, il y aura toujours des solutions à chaque problème et des personnes qui seront votre lumière.
Un dernier mot ?
Soyez fiers de vous, vous êtes les meilleurs guerriers !
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