Troubles bipolaires et coronavirus : comment faire face au confinement ?
Publié le 21 avr. 2020 • Par Candice Salomé
Stéphane, membre Carenity sur la plateforme France sous le pseudonyme Steph1969, a décidé de témoigner sur la façon dont il gère ses troubles bipolaires durant le confinement imposé. Etat d’esprit, habitudes de vie, occupations et préoccupations : il nous dit tout de son quotidien actuel.
Comment se manifestent vos troubles bipolaires habituellement ?
Dans 80% du temps, je me sens plutôt d’humeur dépressive, je suis comme en panne, avec l’impression de faire du sur place, d’avoir peu d’envies, peu de motivation. Dans ce cas-là, tout me coûte et même pour ce qui devrait être un plaisir, je dois me forcer.
Le reste du temps, je me sens mieux mais parfois avec des pics de nervosité, d’excitation, et l’impression d’un trop-plein d’électricité en moi.
Lors de ces phases, je suis plus productif, j’ai plein d’idées, que je mets en route pour certaines, avec toutefois toujours la hantise qu’à un moment donné, je n’arrive plus à suivre, parce que mon humeur va virer, et qu’alors je perdrai la motivation et mes forces physiques et psychiques.
En résumé, j’ai l’impression d’avoir constamment une force qui me tire vers le bas. Je lutte contre elle en permanence. Parfois, je l’emporte, parfois c’est elle.
Vos symptômes ont-ils changé en raison du confinement et du contexte sanitaire (coronavirus) ? Êtes-vous plus angoissé ?
Paradoxalement, le monde tournant au ralenti, je me sens plus en phase avec mon environnement en ce moment. Quand je vais faire des courses par exemple, il y a moins de stress, car moins de monde et d’obligation de se dépêcher.
Il m’arrive de ressentir des moments de vide, mais pas vraiment d’angoisse. En revanche, comme en ce moment, ça va plutôt bien, je me sens parfois comme un lion en cage avec un trop-plein d’énergie dont je ne sais pas quoi faire, tant que je n’ai pas trouvé un objectif pour la canaliser.
Continuez-vous à voir votre/vos médecin(s) en ce moment ?
Oui, je vois mon psychiatre en téléconsultation tous les quinze jours en moyenne, ce qui m’apporte une bouffée d’oxygène. En revanche, je ne vois plus mon infirmière au CMP (Centre Médico Psychologique).
Êtes-vous sous traitement ? Avez-vous dû faire évoluer ce traitement en raison du contexte sanitaire ?
On a eu beaucoup de mal à trouver un traitement qui fonctionne à peu près, donc il n’est pas question d’en changer pour le moment. Le contexte sanitaire ne l’a pas nécessité non plus.
Gardez-vous le contact avec vos proches ? La diminution des interactions sociales (notamment les rencontres physiques) a-t-elle un impact négatif sur votre vie et votre maladie ?
Il est clair que l’absence de relations sociales réelles me manque. J’ai gardé quelques contacts par les réseaux sociaux et les messageries mais ce n’est pas la même chose. Le seul endroit où je vois du monde, c’est au supermarché. Heureusement, je ne vis pas seul, et donc, je peux partager avec les gens qui m’entourent.
Comment occupez-vous vos journées pendant ce confinement ? Avez-vous une routine pour lutter contre la maladie ?
Ma routine, c’est de regarder un opéra tous les soirs grâce aux retransmissions du Metropolitan Opera de New York. Génial. Sinon, j’ai relancé mon blog et je fais du bénévolat pour différentes associations, ce qui m’occupe et me permet de me sentir utile. Et je suis revenu sur Carenity.
Auriez-vous des conseils à donner à d'autres patients bipolaires en cette période de confinement ?
On est tous différents. J’ai écrit un petit texte que j’ai posté sur Carenity et qui apparemment parle à certains. Je pense qu’il ne faut pas céder à l’isolement, maintenir cette heure de sortie autorisée (ce que je ne fais pas hélas mais j’ai la chance d’avoir un espace de vie assez grand avec beaucoup de verdure autour), ne pas trop s’abrutir devant des écrans, lire, écouter de la musique et en profiter pour rêver. Mais bon, c’est à chacun de trouver l’équilibre qui lui convient et surtout se faire plaisir. Échanger sur des forums comme Carenity, ça peut être bien pour partager son vécu de la situation. Je pense d’ailleurs qu’on pourra tirer des enseignements de cette expérience dans beaucoup de domaines pour vivre autrement après.
Enfin, quelle est la première chose que vous aimeriez faire lorsque le confinement sera terminé ?
Aller boire un verre sur une terrasse avec du monde ou avec des personnes que j’apprécie.
Et vous, dans quel état d’esprit êtes-vous en ce moment ? Est-ce que le confinement vous pèse ? Est-ce que vos symptômes ont évolué ou changé ? Continuez-vous à garder le contact avec vos médecins ?
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