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Trouble de la personnalité borderline : “Derrière mon sourire se cache une terrible souffrance.”

Publié le 26 juin 2020 • Par Candice Salomé

Shiva14122019, membre de la plateforme Carenity France, a souhaité témoigner. Il est atteint du trouble de la personnalité borderline*. L'origine de sa maladie remonterait à son enfance dont il nous parle longuement. Il nous raconte également son combat quotidien face à son trouble.

*Le trouble de la personnalité borderline est caractérisé par un schéma omniprésent d'instabilité dans les relations, l'image de soi, les humeurs, le comportement et l'hypersensibilité à la possibilité du rejet et de l'abandon.

Trouble de la personnalité borderline : “Derrière mon sourire se cache une terrible souffrance.”

Bonjour @shiva14122019, vous vivez avec un trouble de la personnalité borderline et avez souhaité témoigner.
Tout d’abord, pourriez-vous nous en dire plus sur vous (Qui vous êtes ? Ce que vous aimez dans la vie ? Votre situation professionnelle et familiale ?) ?

Bonjour, je m’appelle Damien, j’ai 38 ans, je suis marié depuis décembre 2019, et j’ai deux beaux enfants (une fille de 25 ans et un fils de 15 ans, qui sont les enfants de mon épouse). J’ai longtemps pratiqué les arts martiaux. J’ai malheureusement dû arrêter à plusieurs reprises à cause de mes hospitalisations, et j’ai stoppé complètement depuis 2 ans à cause de ma situation personnelle. J’ai pour ambition de reprendre le sport en septembre. J’adore lire, écouter de la musique (surtout celle des années 70-80) et conduire.
J’ai dû arrêter de travailler en mars 2020 à la suite d’un gros burn-out associé à une grosse dépression. Actuellement, je suis des cours de droit à distance afin de pouvoir exercer en tant que juriste d’entreprise.

Le trouble de la personnalité borderline est-il difficile à gérer ? Comment se manifeste la maladie dans votre quotidien ?

A cause de ma maladie, même si j’aime mon épouse et mon beau-fils (qui vit avec nous) et que nous ne manquons de rien, je suis souvent triste mais je ne le montre pas.
Je fais énormément d’insomnies. Lorsque cela m’arrive, je fixe le plafond et mon cerveau cogite (il ne fait que ça d’ailleurs) ou je regarde des documentaires en tout genre.

Il y a des blessures qui ne se refermeront jamais, des questions auxquelles je n’aurais jamais de réponses. Il est clair que nous avons tous notre passé avec ses hauts et ses bas. Alors se plaindre ou se dire que nous sommes malheureux n’y changerait rien à part avoir du dégoût envers soi-même. Cela m’est très souvent arrivé dans le passé.

Parfois, je suis si mal, qu’intérieurement, je suffoque, je hurle et je me renferme.

Ma vie familiale s’en ressent mais l’amour de mes proches et leur patience ainsi que leur soutien et l’écoute de mon épouse m’apaisent et m’aident.

Êtes-vous sous traitement pour votre trouble de la personnalité borderline ? Êtes-vous suivi par un psychologue ou un psychiatre ?

Actuellement, je suis un traitement à base de Dépakine 500, de Largactil et d’Alprazolam. C’est un nouveau traitement que j’ai commencé début mars avec changement de médication et adaptation des doses en suivi régulier avec ma psychiatre que j’ai au téléphone une fois par semaine. Mon traitement fait un peu effet, mais nous allons augmenter le Dépakine 500 dans les semaines à venir. J’ai déjà augmenté (avec l’accord de ma psychiatre) le Largactil.

En ce moment, je gère mal mes émotions et je suis quelque peu instable car je suis mal intérieurement. Ma psychiatre m’a dit que la situation irait mieux mais que ça prendrait du temps. Malgré cela, je sais que ma thérapie me fait du bien.

Je ne suis pas suivi par une psychologue simplement car j’ai une vie de famille bien remplie. J’accepte de parler avec ma psychiatre de ce que je ressens et de ce qu’il se passe dans ma tête. Mais je ne suis pas quelqu’un qui aime réellement parler. C’est assez douloureux pour moi et me fait psychoter encore plus.
Depuis peu, ma femme m’a fait prendre conscience que j’avais des TOC. Si je ne le fais pas, je suis mal et je m’énerve. J’en ai pris conscience mais n’en parle jamais car c’est quelque chose que je n’accepte pas.

Savez-vous d’où vient ce trouble ? Quelle en est l’origine ?

J’ai été complètement sourd lorsque j’étais enfant. J’ai réussi en classe de primaire en lisant sur les lèvres car personne, ni mes parents, ni mes frères, n’a remarqué que j’étais sourd. C’est mon institutrice qui a relevé le problème. Lorsque ma petite soeur est née, 9 mois après l’annonce à mes parents de ma surdité, j’ai été placé à plus de 250 km de chez moi et n’ai pas revu ma famille pendant plus d’un mois.

J’ai vécu de foyer en foyer de mes 8 ans à mes 18 ans et j’ai été battu toute ma jeunesse par mes parents et mes frères. A mes 18 ans, j’ai appris que mes parents avaient signé une décharge, dans mon dos, stipulant que je devais rester en foyer jusqu’à mes 21 ans, mais je l’ai déchirée.
Je suis alors rentré chez mes parents. A ce moment là, mon père m’a étranglé et jeté sur des barres en fer. J’ai appelé mon assistante sociale qui m’a trouvé un studio en 15 jours. Certes, il était délabré mais j’étais enfin chez moi.

J’ai une fille qui doit avoir aujourd’hui 19 ans, mais je ne la connais pas. Sa mère, lorsqu’elle était enceinte, m’a quitté. Elle m’a simplement appelé pour me dire que “jamais je ne connaitrais ma fille”. J’étais jeune avec un passé très douloureux.

C’est la raison de ma première tentative de suicide. Je me suis réveillé 3 semaines plus tard à l'hôpital, en soin intensif, attaché aux chevilles et aux poignets et branché de partout !

Les médecins m’ont dit que ma mère était venue me voir 15 minutes seulement et mon père leur avait dit que ce serait mieux si je ne me réveillais pas.

Depuis, j’ai été deux autres fois dans le coma pendant 1 semaine. J’ai fait beaucoup de séjours en hôpital, j’ai eu de nombreux traitements et j’ai fait beaucoup de nouvelles tentatives de suicide.

J’ai également tout perdu et je me suis retrouvé à la rue à de nombreuses reprises (en cumulé, j’ai passé 3 ans à la rue). Je suis tombé dans l’alcool et la drogue (surtout le cannabis, je fumais 25 joints par jour).

Quand a été diagnostiqué votre trouble de la personnalité borderline ?

Le diagnostic de mon trouble de la personnalité borderline a été réellement posé en 2012 lors de ma dernière hospitalisation suite à un énième tentative de suicide. Ce diagnostic m’est apparu comme un choc. Les médecins m’ont dit que cela était dû à des traumatismes apparus dans l’enfance. Ils m’ont aussi dit que je serais borderline toute ma vie, ce qui m’a mis très en colère.

Avez-vous d’autres pathologies en dehors de votre trouble de la personnalité borderline ?

J’ai beaucoup d’autres pathologies en plus de mon trouble de la personnalité borderline : tassement des vertèbres, problème d’arthrose au genou, dolichocôlon (colon trop long, ce qui engendre des occlusions intestinales). J’ai fait un infarctus mésentérique supérieur à 26 ans ainsi qu’une pancréatite aigüe. J’ai une surdité avancée ainsi qu’une tumeur à l’oreille droite. Mais je suis en vie, je respire et je suis entouré par mes proches, et c’est le principal.

Je n’accepte toujours pas ma maladie et je ne sais pas si je l’accepterais un jour. Mais je sais que je dois me battre pour mes proches.

Êtes-vous soutenu par votre entourage ?

Mon épouse est très présente et à l’écoute. Elle me soutient énormément. Mais malgré tout son amour, elle ne comprend pas ma maladie, et cela me fait peur et énormément culpabiliser. Je parle rarement de mon trouble et de mes ressentis car je fais en sorte de m’occuper de mes proches, d’être là pour eux, de les écouter, de les soutenir et de les faire vivre. Derrière mon sourire et ma “joie de vivre” se cache une terrible souffrance.

Que pourriez-vous conseiller aux membres également atteints par le trouble de la personnalité borderline ?

Ce que je peux conseiller aux borderlines, et même à tous ceux qui me liront, c’est de ne jamais culpabiliser vis-à-vis de votre maladie ou de votre passé, même si vous avez fait des erreurs. C’est derrière vous et ne pouvez maintenant qu’avancer. Courage, la vie est belle, même si c’est parfois très dur ! Surtout, restez vous-même ! Je dis souvent qu’on ne peut pas changer mais évoluer !
Si quelqu’un veut vous faire changer, c’est qu’il ne voit pas en vous la belle personne que vous êtes. Quelque soit la maladie que nous avons, nous sommes humains avec nos qualités et nos défauts, et nous avons droit aussi au bonheur !
Courage à vous tous et toutes, et merci d’avoir pris le temps de me lire !

 

Un grand merci à Shiva14122019 pour avoir accepté de témoigner pour Carenity.

Selon vous, à quoi est dû votre trouble de la personnalité borderline ?
Quels sont les signes de la maladie dans votre quotidien ?


N'hésitez pas à en parler dans les commentaires, nous sommes là pour nous soutenir !
Bon courage à tous, prenez soin de vous !

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avatar Candice Salomé

Auteur : Candice Salomé, Rédactrice Santé

Créatrice de contenus chez Carenity, Candice est spécialisée dans la rédaction d’articles santé. Elle a une appétence particulière pour les domaines de la psychologie, du bien-être et du sport.

Candice est... >> En savoir plus

13 commentaires


carmenf
le 06/07/2020

J'ai longtemps, comme vous, eu d'énormes problèmes à cause de cette maladie. Mais lors d'une de mes nombreuses hospitalisations, un nouveau médecin m'a fait faire une thérapie qui m'a fait enfin comprendre que les problèmes très souffrant que j'ai vécu n'étaient pas de ma faute et surtout, que je pouvais les surmonter. Ce médecin comprenait vraiment ce que je vivais, il a été d'une grande aide. Malgré cette thérapie, je dois prendre beaucoup de médicaments pour rester "normale" (c'est-à-dire pour ne pas déprimer, etc.) c'est un problème énorme que vivent les personnes qui sont en plus hypersensibles et malheureusement terriblement  maltraitées par les figures d'autorité durant l'enfance. Vous êtes quelqu'un d'honorable d'avoir ainsi témoigné. Merci et gardez courage, vous êtes merveilleux, ne l'oubliez jamais !


avatar
Utilisateur désinscrit
le 08/07/2020

Courage à toi la roue tourne ,  rien n'arrive pour rien ,    conserver l'espoir et surtout la santé physique et mentale        


carmenf
le 12/07/2020

Je crois qu'avec cette maladie, nous avons l'hypersensibilité....

https://sain-et-naturel.ouest-france.fr/explique-lhypersensibilite.html?fbclid=IwAR0nA3k1rx7h0poC0COn1KFlt_MWRBao4lHqJnqkqyKrWXE8FufrBxApFso


BorderlinePower
le 12/07/2020

L'hypersensibilité est la forme atténuée du trouble, les émotions sont fortes mais cela ne mène pas jusqu'à l'automutilation ou le risque suicidaire. Dans le trouble borderline c'est encore un niveau au dessus et surtout une souffrance extrêmement destructrice,

Un grand merci pour ce témoignage et le courage de dévoiler ces souffrances intimes. Encore une fois je constate que des graves traumatismes sont sous-jacents au trouble. C'est vraiment important que le dialogue s'instaure sur ce point. J'ai l'impression que nous avons tous cela en commun, ainsi que les addictions et le haut risque suicidaire.

Je suis diagnostiqué depuis 16 ans. Je n'acceptais pas le diagnostique au début puis à force de résister et de me détruire j'ai compris que je ne pourrais pas aller contre mais seulement avec. Cela signifie aussi d'accepter les rechutes et de traverser les émotions dites 'négatives'.

J'ai eu de nombreux psychiatres de nombreuses écoles. S'il y a bien quelque chose qu'ils ont en commun c'est leur désarroi quand je suis en grandes souffrances. Les choses changent mais jamais assez vite quand on est concerné. J'aurais eu l'occasion de faire le module sur la mentalisation (une thérapie très efficace) malheureusement je n'ai pas pu à cause de mes problèmes de santé physique.

'Guérir' dans la littérature scientifique signifie avoir une minorité des traits diagnostiques, au moins une relation sociale stable, maintenir un emploi et avoir une vie que vous jugez 'de qualité'.
Une 'rémission' c'est la disparition de la majeur partie des traits diagnostiques sur au moins 2 ans.
Avec une thérapie adaptée, 75% des patients obtiennent une rémission en 6 ans. La rémission a été étudiée et elle existe.

Me concernant je suis dans la mauvaise statistique. Il existe une troisième option qui s'appelle le 'recovery' et c'est justement tenter de trouver le meilleur équilibre avec la/les maladies dont on souffre. C'est ce que je vise au quotidien parce je souffre de plusieurs maladies invalidantes.

Ne vous jugez pas trop durement, nous sommes réellement handicapés. Les recherches ont mis en évidence que la zone du contrôle émotionnel ne fonctionne plus ou mal chez nous. Heureusement, comme beaucoup d'autres parties du cerveau, elle est malléable et peut récupérer jusqu'à un certain point.


Borderline68
le 26/09/2020

Bonjour

j'ai 38ans j'ai un fils de 7 ans ma femme est partie..et j'ai été diagnostiqué  borderline il y a 5ans..je souffre d'hypersensibilité  de plusieurs dépendances comme le tabac ,l'alcool,le sexe bref tout ce que je n'ai pas encore fait c'est la drogue, jai beaucoup de tendance suicidaire j'ai commencé à me mutilé..,ma vie sociale est nul tout le monde me méprise ,j'ai perdu tout mes amis,ma famille commence à me tournée le dos bref je suis seul et je souffre beaucoup...si je suis encore présent c'est pour mon fils sinon je serais déjà plus de ce monde..est ce qu'il y a d'autres personnes qui vivent cela?

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