Surmonter les troubles sexuels liés au cancer de la prostate
Publié le 23 nov. 2016 • Par Léa Blaszczynski
Eugène, membre Carenity, est atteint d’un cancer de la prostate. Il nous raconte son histoire à travers ce témoignage.
1 - Bonjour Eugène, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Bonjour, j’ai 63 ans et j’ai eu mon cancer de la prostate à l’âge de 46 ans. Je travaillais à la poste comme guichetier. Je suis marié, j’ai 2 enfants et une petite fille âgée de 8 mois.
2 - Pouvez-vous nous en dire plus sur le diagnostic de votre cancer ?
J’ai été soigné par mon médecin traitant dont le diagnostic se limitait à des infections urinaires non confirmées par les analyses avec un taux de psa à 4ng/ml.
J’ai vu 3 urologues avec une échographie qui montrait une calcification mais une prostate de taille normale.
Cela a duré 3 ans et j’ai décidé de consulté un médecin. Son examen ne montrait pas d’inquiétude et il a adopté le principe du doute.
10 biopsies ont été réalisées. 6 ce sont révélées cancéreuses. J’ai subi une prostatectomie radicale sans traitement. Tout s’est bien passé avec bien entendu les effets de cette chirurgie (absence de rapports sexuels). J’ai eu une récidive en 1998 traitée à Villejuif par radiothérapie et à ce jour RAS.
3 - Aviez-vous de la famille ou des proches touchés par cette maladie ?
Dans le cancer de la prostate, non, mais mon frère est décédé d’un cancer du rein. Son fils donc mon neveu est décédé à 40 ans d’un cancer de la mâchoire. Ma belle-sœur est décédée il y a 2 ans d’un cancer génital et ma femme a actuellement 2 cancers (vessie et larynx).
4 - Comment avez-vous combattu votre cancer ?
J'aimerais d'abord vous raconter mon parcours :
J’ai eu une jeunesse, une adolescence tourmentée et des parents absents. J’ai très peu de souvenir de mon enfance ; je n’ai pas connu de grand-père celui maternelle s’est suicidé et mon grand-père paternel a abandonné sa famille dont mon père. J’ai connu épisodiquement ma grand-mère maternelle sans aucune marque d’affection.
Mon père est devenu alcoolique lorsque ma mère a eu un amant et je m’en suis occupé. J’avais 13 ans. Nous étions 4 fils à la maison et il est venu vers moi. Nous n’avions jamais de conversations ensemble. Je l’ai aidé à s’en sortir. Je crois qu’il la fait pour moi. Je lui voue une adoration sans faille et il me manque. Il est décédé en 1997 à 89 ans.
Pour ma part. J’ai connu la drogue et la prostitution des 17 ans avec une overdose suivi d’une cure de sommeil un internement en psychiatrie et 9 mois de souffrance.
Je n’ai eu aucun soutien. Je me suis marié, nous avions déjà notre fille et la réhabilitation à la vie s’est faite sans trop de heurt.
Je pense que cette envie de vivre est liée à tout cela et que malgré tout, j’en dois une part à mon médecin ainsi qu’à mon deuxième médecin traitant que je considère comme un ami et je sais que cela est réciproque de sa part. J’ai aussi eu la chance d’être fonctionnaire et de ne pas avoir à me soucier de problèmes de revenus et cela m’a permis de ne pas avoir un poids de plus à endurer.
5 - Avez-vous un message à partager avec les lecteurs ?
Ce cancer a un impact sur ma vie sentimentale et sexuelle. A 46 ans et une femme de 41 ans, vous êtes confronté au doute permanent. Il y a un manque de suivi à ce niveau de la part des médecins. Des traitements sont proposés comme les piqûres dans la verge extrêmement douloureuses et ont abandonné très vite cette solution. Il y a la prothèse pelvienne pas fiable ou avec un rejet chez certains patients et enfin le viagra ou le cialis qui fonctionne si le traitement se fait tôt mais qui n'est pas remboursé, ce que je trouve injuste pour les patients atteint du cancer. Les injections sont remboursées 24 euros les 2.
Il est important pour le malade de retrouver ce moment de tendresse et de confiance en soi par la même occasion et d’apaiser des tensions au sein du couple qui n’auraient pas lieu d’être.
Comme je vous l’ai écrit auparavant, je puise ma force de vivre de par mon passé, par le sport et le travail. Je conduis des enfants handicapés ou autistes dans des établissements scolaires et depuis 3 ans j’ai un autre regard sur ma maladie. Ces enfants n’ont pas de défenses. Ils sont tributaires de beaucoup de choses et je me dis quelle chance que la mienne d’être là.
Je voudrais dire aux lecteurs, n’ayez pas honte de votre maladie. Parlez-en autant que vous en ressentez le besoin et tournez-vous vers un psychologue et non pas un psychiatre, croyez-en mon expérience. Maintenant les traitements ont changés et sont moins invasifs et surtout n’hésitez pas à consulter votre médecin lorsque vous sentez que quelque chose ne va pas et demandez des examens.
Moi, je fais des contrôles sanguins tous les 6 mois, ce qui a permis de voir que ma maladie revenait. Aujourd’hui, je suis assommé par ce qui arrive à mon épouse et un nouveau combat pour la vie continu. Cela m’a ramené 16 ans en arrière mais avec 16 ans de conviction qu’il ne faut rien lâcher. Prenez tous ce qui vous procure du bonheur, de la joie et laissez les petites misères de côté.
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