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Patients en état végétatif : où commence « l’obstination déraisonnable » dans les soins ?
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Voilà une décision très difficile à prendre. Quand il s'agit d'une personne aimée nous n'avons pas envie de la voir partir même si nous savons que cela ne sert à rien. Pour mon cas personnel, je ne veux pas d'acharnement thérapeutique mais je ne veux pas choisir entre la mort et la vie. Ma religion m'interdit le suicide assisté.
maintenant si je devais souffrir au delà de ce que je pourrais supporter, je ne sais pas quelle serait ma décision, il est très difficile d'en débattre quand nous ne sommes pas encore concerné.
Je ne jugerais personne qu'elle que soit la décision prise par les familles.
Marie-France
maloulai
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maloulai
Dernière activité le 25/11/2024 à 09:23
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Je souscris entièrement à cette analyse ....et à cette prise de position ;
Marie-Louise
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Louise
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Louise
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Dernière activité le 06/10/2020 à 12:05
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La fin de vie s’invite dans le débat public, tandis que la consultation en ligne des États généraux de la bioéthique reste ouverte jusqu’au 1er mai. Tout citoyen peut y poster ses propositions sur le thème "prise en charge de la fin de vie"
Valérie Depadt, maître de conférences en droit à l’université Paris 13, a codirigé avec Karine Lefeuvre, professeure en droit privé à l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP), l’ouvrage Protéger les majeurs vulnérables, quels nouveaux droits pour les personnes en fin de vie ? paru récemment aux Presses de l’EHESP. Elle a sollicité le témoignage de Anne-Claire de Crouy, médecin en service de rééducation post-réanimation (hôpitaux universitaires Paris-Sud Kremlin-Bicêtre), dont nous publions ici un extrait.
L’état d’éveil "non-répondant" ou "état végétatif" est un terme utilisé pour décrire la situation clinique de patients victimes de lésions cérébrales sévères. À l’issue de la réanimation, l’interaction de ces patients avec l’environnement est insuffisante pour établir la réalité d’une conscience, et encore moins la compréhension du langage. Ces patients n’ont pas d’autre assistance qu’une alimentation entérale simple par sonde naso-gastrique, ou directement dans l’estomac par gastrostomie. Il faut plusieurs mois pour considérer cet état comme stable et le nommer « chronique » ou « persistant ».
Entre l’accident et la constatation de ce handicap chronique d’une extrême gravité, le patient bénéficie donc de soins d’urgence, de réanimation, de rééducation et chaque équipe s’acharne à bien soigner, à engager en conscience les soins nécessaires sans négliger le contexte particulier de son intervention.
L’évolution des techniques de neuro-réanimation permet d’écourter les durées de soins sous sédation et de débuter les soins de rééducation dès la réanimation. De cette évolution sont nées les unités de Soins de rééducation post-réanimation (SRPR), au sein desquelles les médecins réanimateurs et ceux de Médecine physique et de réadaptation (MPR) travaillent en collaboration afin de développer des soins innovants.
Ces soins visent essentiellement le mieux-être des patients victimes de lésions neurologiques sévères cérébrales et/ou médullaires, c’est-à-dire de la moelle épinière. Dans ce contexte, les soignants des deux spécialités partagent leurs techniques et dialoguent, avec une représentation des soins très différente car liée à leur culture professionnelle. Cette dualité d’approche favorise, sans aucun doute, le débat éthique.
Des patients particulièrement fragiles durant les premières heures
Il est important de comprendre qu’un patient atteint d’une lésion cérébrale sévère comme un traumatisme crânien grave, un accident vasculaire cérébral (AVC) hémorragique ou ischémique (manque d’apport d’oxygène dans le cerveau), doit être pris en charge en urgence par une équipe de neuro-réanimation, capable de mettre en place des soins et une surveillance cérébrale spécifiques. C’est le seul moyen de diminuer la mortalité, mais surtout la morbidité (état de maladie) et donc le handicap lié à ces accidents. Ces patients sont particulièrement fragiles durant les premières heures qui suivent leur atteinte cérébrale aiguë. Il est donc indispensable, dès l’apparition des premiers symptômes, d’engager des soins intensifs appropriés (SAMU, pompiers…).
Pour une bonne prise en charge précoce, il est également indispensable de lutter contre les "prophéties auto-réalisatrices" (self fulfilling prophecies). En d’autres termes, on sait aujourd’hui que le fait de dire, de penser ou d’écrire qu’un patient va probablement mourir peut entraîner véritablement sa mort. Le pessimisme transmis à l’équipe ne lui permet pas de faire les soins comme si elle n’avait aucune idée préconçue.
Ces situations sont extrêmement courantes en neuro-réanimation et ont été particulièrement étudiées dans les hématomes intracrâniens (HIC). Dans une population admise à l’hôpital pour ce type d’hématome récent, le simple fait d’informer la chaîne de soins (médecins, infirmiers, kinésithérapeutes, aides-soignants) qu’il ne sera pratiqué aucune réanimation en cas d’arrêt cardiaque, double la mortalité des patients comparée aux mêmes patients sans transmission d’ordre éthique, selon une étude publiée en 2007.
L’influence des décisions éthiques précoces sur la mortalité est telle que le simple fait d’imposer à une équipe d’attendre 5 jours pour discuter d’une telle décision, divise par 2 (de 50 à 20 %) la mortalité prédite, sans aggraver la morbidité de patients victimes des hématomes intercrâniens, selon une étude publiée en 2015. On observe un phénomène comparable dans la prise en charge dans les premières heures des patients traumatisés crâniens.
Il n’y a donc pas "d’obstination déraisonnable" a priori ; les traitements sont invasifs mais nécessaires à ce moment où le pronostic est terriblement incertain.
Discuter en équipe pour ne pas tomber dans l’obstination déraisonnable
Après cette première étape d’accueil et de stabilisation des fonctions vitales, le patient est admis en réanimation où la notion d’équipe est extrêmement forte. L’organisation même de la continuité des soins intensifs de jour, de nuit, week-end et jours fériés, les repos de garde, nécessitent un relais quotidien auprès du patient. Les transmissions sont faites devant toute l’équipe et chaque décision peut donc être discutée, y compris a posteriori. Les réanimateurs se battent donc en équipe, avec leurs collègues – neurochirurgiens, neuro-radiologues… – pour administrer ces soins le plus rationnellement possible, sans tomber dans l’obstination déraisonnable.
Chaque médecin tente de pondérer sa pratique en fonction de sa compétence et du plateau technique disponible, du projet de soin négocié avec le patient et sa famille, ainsi que de sa culture professionnelle. Il n’existe pas de moment précis auquel un médecin décide un acharnement thérapeutique : c’est une suite de glissements qui font interroger a posteriori cette notion. Dans l’après-coup, on peut observer que l’excès ou l’insuffisance de telle ou telle prise en charge a conduit à une situation de handicap regrettable ou à un décès prématuré que personne n’a choisi. En ces cas, la peur de l’échec risque de conduire à une abstention systématique coupable pour les patients les plus à risque de "mauvais résultat".
Après quelques semaines de soins de réanimation, le pronostic fonctionnel se dessine et notamment le mauvais pronostic avec l’apparition d’un éveil végétatif, c’est-à-dire une alternance veille-sommeil sans autre signe objectif de conscience. Dans cette période s’ouvre, en équipe et avec les proches, la discussion concernant la Limitation des thérapeutiques actives de réanimation (LATA). Dès que possible, le médecin de médecine physique et de réadaptation (MPR) est sollicité pour mettre en place les soins nécessaires au confort du patient. Après quelques semaines, les patients qui survivent à cette période de réanimation sont transférés dans l’unité de SRPR pour améliorer les soins de confort et organiser la sortie de l’hôpital.
Le nécessaire concours des proches dans l’élaboration d’un projet de vie et de soins
Dans la situation habituelle d’un patient, classiquement jeune, victime d’un accident ayant entraîné une lésion cérébrale sévère, aucune directive anticipée n’a été rédigée, pas plus qu’une personne de confiance n’a été désignée.
Introduite dans la loi de 2002 relative aux droits des malades, la personne de confiance est régie par l’article L. 1111-6 du Code de la santé publique 21. La loi de 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, dite loi Leonetti, fait aussi référence en son article 5, à la personne de confiance.
Mais en l’absence de personne de confiance, la loi ne propose aucune hiérarchie parmi les proches auxquels le médecin se trouve confronté. L’équipe médicale va alors chercher une ou plusieurs personnes, désignées par la famille, qui peuvent témoigner de ce qu’aurait pu souhaiter le patient pour lui-même. Cette démarche est effectuée par l’équipe de réanimation dès l’admission du patient pour discuter les soins intensifs, le pronostic fonctionnel et éventuellement un arrêt des soins de réanimation.
Malgré le délai depuis l’accident à l’arrivée à l’unité de SRPR, c’est avec certaines incertitudes qu’on rencontrera les proches du patient. En effet, même dans une situation très sévère, le pronostic fonctionnel est en partie inconnu. Si l’on peut sans risque prédire des séquelles très graves associant des troubles neuro-moteurs et cognitifs du comportement, personne ne peut décrire la gravité précise des séquelles pour un patient précis qui sort de réanimation.
Ce flou, inévitable, risque d’entretenir chez les proches des croyances de récupération miracle alors que la gravité des séquelles et la perte totale d’autonomie sont, elles, diagnostiquées de façon certaine. De plus, ces types de séquelles sont mal connus du grand public et il faut parfois du temps à l’entourage pour comprendre l’ampleur des troubles et, soit imaginer pour leur proche une nouvelle façon de vivre avec ce handicap, soit refuser cette forme de vie qui peut n’apparaître que douloureuse.
La demande d’arrêt des thérapeutiques actives, rare à ce stade
Dans les faits, il est très rare qu’une famille demande en rééducation une limitation ou un arrêt des soins, même dans des situations de handicap extrême. À ce moment de leur histoire, la famille s’est le plus souvent centrée autour du handicap et en a accepté le poids avec fatalisme.
La durée d’hospitalisation en rééducation est en général de quelques mois et se prolonge par la prise en charge dans un lieu de vie médicalisé, de type institution médico-sociale. Pour éviter que ces patients en état végétatif chronique (EVC) ou état pauci-relationnel (EPR) n’attendent trop longtemps dans des services de soins tout à fait inadaptés à leur état, depuis 2002, une circulaire organise l’accueil des patients dans des unités de vie spécialement pensées pour eux.
Cette circulaire précise : « On parle d’"état végétatif chronique" lorsque cette situation perdure au-delà d’un délai variable selon la pathologie causale (3 à 6 mois pour les états végétatifs d’origine médicale, 12 à 18 mois pour les états végétatifs d’origine traumatique) avec un espoir devenu minime d’une évolution vers un retour à la conscience. »
Les services de médecine physique et de réadaptation sont donc appelés à faire une proposition de soins adaptés. Dans un état végétatif ou pauci-relationnel, le patient ne peut pas participer volontairement aux soins de rééducation et les objectifs se résument à des soins de confort et de stimulation. Mais le corps d’une personne avec une lésion cérébrale aussi sévère nécessite beaucoup de soins, tant pour éviter des escarres et des rétractions musculo-tendineuses et articulaires potentiellement douloureuses, que pour tenter un sevrage de la canule de trachéotomie.
Par ailleurs, le confort nécessite qu’on organise les soins infirmiers, de kinésithérapie, d’ergothérapie, d’orthophonie, de psychomotricité, de façon à respecter l’alternance entre le jour et la nuit, entre l’activité et le repos. De plus, on installe le patient dans un fauteuil roulant manuel adapté pour qu’il puisse être sorti de sa chambre, bénéficier d’ambiances lumineuses et sonores variées. Ce type de soins demandant aux soignants un investissement important en temps et en énergie, il se produit un attachement très particulier à ce corps/patient qui est le réceptacle de toutes sortes de projections. De ce fait, il se développe souvent un lien spécifique entre la famille et les soignants, solidaires dans les soins d’hygiène et de confort, qui échappe le plus souvent au médecin.
S’interroger régulièrement sur le niveau de soin raisonnable
Pourtant l’équipe de rééducation qui prend en charge le patient doit régulièrement interroger, en équipe et avec les proches, le niveau de soin raisonnable compte tenu du handicap déjà constitué. Il existe en effet un risque majeur d’obstination déraisonnable. Ces patients sont à haut risque de complications thrombo-embolique, respiratoire, épileptique, infectieuse… mais leur manque d’autonomie fait que ces complications sont généralement rapidement détectées et prises en charge médicalement.
Il ne s’agit pas, à proprement parler, de rédiger avec les proches ce qui pourrait constituer des "directives anticipées", mais de tracer dans le dossier du patient des consignes claires qui permettront d’éviter des soins excessifs en l’absence du médecin référent du patient, notamment la nuit et le week-end. La famille doit comprendre le sens de cette limitation des soins, d’autant plus que les proches peuvent s’opposer à la limitation et/ou l’arrêt des soins pour des raisons dogmatiques, sans lien avec la réalité médicale et aucune référence à la vie qu’aurait pu souhaiter le patient pour lui-même. Il faut parfois beaucoup de temps et des entretiens répétés pour parvenir à déterminer un niveau de soins raisonnable. Classiquement, on propose de ne pas réengager des soins de réanimation et d’intensifier les soins de confort, ce qui permet le plus souvent de garder le patient dans le service qui le connaît, y compris pour des soins de fin de vie.
Les SRPR sont des espaces de soin hybrides qui organisent la collaboration des soignants de réanimation et de médecin physique et de réadaptation, ce qui permet de croiser des cultures professionnelles aux visées très différentes et d’enrichir le débat éthique. Nous défendons l’idée que le passage de la réanimation au SRPR des patients en état végétatif chronique et pauci-relationnel ne doit pas conduire à éluder la question du niveau de soins raisonnable dans cette situation de vie atypique. Et cela demande un effort particulier.
En effet, malgré la continuité dans la prise en charge, l’intention de soin change entre les deux unités. On passe de soins d’urgence et de réanimation qui permettent de sauver la vie et tentent de limiter le handicap à des soins de confort. La temporalité n’est pas la même et les soignants comme les proches trouvent un sens aux soins qu’ils apportent à cette personne totalement dépendante d’eux. Cette façon d’accueillir la vie ne doit pas nous faire oublier notre responsabilité vis-à-vis de la personne handicapée, incapable de communiquer et de faire entendre son point de vue sur les soins entrepris et poursuivis après la réanimation. Paradoxalement, en l’absence de réflexion élaborée et tracée dans le dossier de soins, le patient risque de subir des examens et des traitements abusifs.
Il paraît donc important, dès l’admission au SRPR, de continuer à discuter entre soignants et avec les proches sur les soins à ne pas engager pour permettre d’assumer une complication éventuellement létale dans un espace de soins respectueux du confort du patient.
The Conversation