Cancer du sein : oncofertilité et hormonothérapie
Publié le 4 avr. 2018 • Par Léa Blaszczynski
Découvrez l'histoire d'Angélique (@Seinrose), membre de Carenity touchée par le cancer du sein. Cette jeune femme de 35 ans, vivant dans la Loire, tient une page Facebook intitulée Sein Rose afin de mener une action de sensibilisation sur le cancer du sein et d'apporter du soutien aux autres.
Quel a été votre parcours de santé ?
En septembre 2016, quelques jours avant de partir en voyage au Canada avec mon mari pour trois semaines, j’ai ressenti une petite douleur, comme des élancements en dessous de l’aisselle. Quand je m’auto-palpais au début, je ressentais une toute petite masse mais je pensais que c’était juste un ganglion de règles. En effet, on entend souvent qu’une tumeur au sein ne fait pas mal. Mais ça arrive, car celle-ci était située près d’un nerf pectoral (et heureusement !). Puis, la masse grandissante et les douleurs persistantes, j’ai consulté auprès de ma gynéco : écho, mammo, biopsie … vous connaissez la procédure. Mon parcours de soin a ensuite été : tumorectomie, chimio, rayons et maintenant hormonothérapie pour cinq ans.
Pouvez-vous nous parler de l’oncofertilité ?
Avec plaisir ! Grâce à l’évolution de la médecine, aujourd’hui, il est possible de préserver sa fertilité quand on a un cancer hormono-dépendant. Je trouve que nous n’en parlons pas assez, il y a encore trop de femmes qui passent à côté de cette possibilité.
Lorsque l'on m'a expliqué les traitements que j’allais devoir suivre, j’ai appris que ces traitements peuvent provoquer des difficultés au niveau des cycles et donc rendre une grossesse compliquée (puisque je devrai attendre cinq ans après l’hormonothérapie pour tenter une grossesse naturelle donc à 40 ans) et qu’en de rares situations rendre stérile. Alors, on m’a proposé une réservation de ma fertilité. Nous n’avons pas encore d’enfants avec mon mari. On n’était pas pressé d’en avoir mais en vouloir oui ! Et surtout, cette "mise en danger de ma fertilité" m’a fait réaliser que je ne voulais pas passer à côté de la maternité.
Ma gynécologue m’a ainsi expliqué comment préserver ma fertilité : soit mettre de côté 100 % d’ovocytes, soit 100% d’embryons, ou bien 50% d’ovocytes, 50% d’embryons. Avec mon mari, nous avons fait le choix de faire 100% embryons. Ensuite, il fallait attendre qu’une RCP donne "le feu vert" car j’ai un cancer du sein hormonodépendant, donc des injections d’hormones posaient question (les cellules cancéreuses aiment se nourrir des hormones). La chimiothérapie devait commencer un mois après à peine donc j’ai obtenu l’autorisation. Puis, sous anesthésie générale, mes ovocytes ont été prélevés (par ponction des ovaires) et mon mari a fait son recueil de spermatozoïdes. Le reste se passe en laboratoire comme une FIV sauf que nous, nos embryons sont congelés et qu’il n’y a pas eu la dernière étape de transfert, celle-ci se fera uniquement si j’ai des difficultés à avoir un enfant quand j’aurai terminé mon traitement d’hormonothérapie.
Nous en avons sept embryons de côté qui nous attendent au chaud (bien qu’ils soient congelés) au cas où nous en aurions besoin.
Quel était votre regard sur ce sujet ? Et aujourd’hui ?
J’avoue que je n’avais pas d’opinion sur le sujet avant, je ne savais pas du tout qu’en cas de traitement par chimio, il était important de préserver sa fertilité.
Mon regard aujourd’hui est tout autre. Je suis passée par là et je mesure maintenant l’importance que cette préservation de la fertilité quand on apprend que l’on va faire de la chimio alors qu’on a pas encore au d’enfants (ou qu’on désire en avoir d'autres). Je souhaite ainsi partager mon expérience pour que les femmes puissent être sensibilisées à ce sujet. J’aimerais d’ailleurs pouvoir faire plus pour que cette information, souvent donnée trop tard aux patientes avant de démarrer les soins, puisse être communiquée par le professionnel dès l’annonce !
En avez-vous parlé avec votre époux ? Votre décision aurait-elle pu être différente si vous aviez été célibataire ?
Mon mari était présent quand mon infirmière d’annonce (que je remercie encore au passage) nous a parlé de cette préservation de la fertilité. D’ailleurs heureusement car cela a été un véritable coup de massue. Je ne m’attendais tellement pas à ce qu’on me parle de ma fertilité qui pouvait être mise ne danger alors que je venais pour parler des soins que j’allais avoir pour mon cancer du sein. Du coup, mon cerveau n’étant plus en capacité d’écouter ce qui a suivi pendant quelques minutes, mon mari lui était là et bien à l’écoute de l’infirmière.
Pour lui, le plus important était ma guérison, mais il a tout de suite compris que cette préservation de ma fertilité (de la "nôtre" aussi) était très important pour moi alors il a été très présent. On a décidé ensemble qu’on ne ferait que des embryons. Si j’avais été célibataire, j’aurai fait exactement la même démarche de préservation. Mais uniquement des ovocytes bien évidemment.
Pouvez-vous nous parler de l’hormonothérapie ?
Au lieu de vous parler de l’hormonothérapie, je vous invite à regarder la vidéo que j’ai réalisée sur l’hormonothérapie et ses actions. Je l’ai réalisé en collaboration avec l’infirmière de coordinatrice de ma chirurgienne et elle a été visualisée et validée par mon oncologue.
La chimiothérapie et la radiothérapie sont des traitements qui nous sont très bien expliqués par les soignants mais l’hormonothérapie beaucoup moins je trouve. Et ce que l’on trouve sur Internet est souvent difficilement compréhensif. J’ai donc réalisé cette vidéo à l’intention d’autres patientes qui souhaitent comprendre ce qu’est vraiment l’hormonothérapie.
Quel impact le cancer a-t-il eu sur votre vie ?
Je dirai que dans l’ensemble, de façon contradictoire, j’ai l’impression que la maladie m’a apporté beaucoup de choses positives :
- - J’ai rencontré de belles personnes et j’en rencontre encore
- - Avant la maladie, je profitais de chaque moment présent. Maintenant, je me pose davantage cette question quand quelque chose arrive : "est-ce un gros, moyen ou petit problème ?" et souvent je conclus par un "c’est un petit problème, alors ne te prend pas plus la tête que ça". Je profite donc encore plus de chaque instant.
- - J’ai envie de profiter encore plus pleinement de mes proches et d’aller au bout de mes projets.
Et je parle d’aspect contradictoire, car on se passerait bien d’avoir été malade et de devoir vivre maintenant avec une épée de Damocles ! Fini pour moi l’insouciance et d’aimer croire que je suis peut-être immortelle. Cela c’est la partie que j’arrive à verbaliser, ensuite il y a quelque chose en moi qui a changé mais sans arriver à vraiment verbaliser tous mes ressentis.
Savez-vous quel regard votre époux porte-t-il sur cet épisode ?
Le mot qui me vient à l’esprit quand je pense au regard de mon époux sur cet épisode est : inquiétude. Il s’est beaucoup inquiété et continuera à l’être à l’approche de chaque examen et de tout nouveau "bobo". Il a été très présent et d’un grand soutien pour moi.
Quel est votre état de santé aujourd’hui ? Et quel est votre état d’esprit ?
J’ai repris le travail depuis janvier 2018 en temps partiel thérapeutique. Je ressens encore beaucoup de fatigue, je ne sais pas si c’est parce que la fin des soins n’est pas si loin ou si c’est aussi un effet de l’hormonothérapie mais cette fatigabilité est présente. Donc la reprise à temps partiel est nécessaire. Sinon, je vais bien !! Il faut même que je me freine car j’ai pleins de projets en tête !
Quels sont vos projets à court, moyen et long termes ?
RELATIVISER, POSITIVER et SUBLIMER ont été mes maîtres mots pour rendre plus joli et joyeux mon nouveau projet de vie qui s’était imposé à moi depuis novembre 2016 : un cancer du sein ! Parce que j’aime échanger, partager, j’ai donc créé un compte Facebook Sein Rose pour diffuser des conseils, avis, idées et mes trucs et astuces pour mieux traverser la période de traitement avec d’autres roses et aussi organiser des rencontres pour pas rester isolée. Lorsqu’on traverse une période de soin, quel que soit la maladie, je trouve cela important ! Je propose aussi des échanges téléphoniques ou mails aux femmes qui sont en soin et qui ont besoin, envie d’échanger avec quelqu’un qui est déjà passé par là.
Je suis ambassadrice de l’association Jeune & Rose et nous avons des projets d’organiser des rencontres roses dans la Loire/Rhône mais je ne peux pas en dire plus ce jour car c’est en cours de création. Je continue à vendre mes bijoux de sein rose et de reverser 1,50 euros par bijoux vendus à la recherche contre le cancer. Aussi, je vais bientôt créer un site Internet, qui sera un mélange de blog, et de recensement de toutes les adresses/site/associations que l’on peut trouver en France et qui concerne le cancer du sein. J’aimerai aussi beaucoup m’investir plus ans la sensibilisation à l’oncofertilité.
Quel message souhaitez-vous transmettre aux personnes dans une situation similaire à la vôtre ?
Je vais dire le même message que j’ai déjà pu dire dans d’autres témoignages : la maladie, ce n’est pas quelque chose de simple. Cela me dérange un peu quand les personnes essayent de banaliser le cancer du sein en disant qu’aujourd’hui c’est rien, qu’on en guérit comme une grippe. Car déjà, ça se soigne pas comme une grippe, et malheureusement encore trop de femmes en meurent chaque jour ou ont des cancers du sein métastatiques.
Mais, de nature optimiste, j’ai envie de dire que oui, c’est pas simple mais on arrive à surmonter les traitements et qu’après ces derniers, on arrive à reprendre goût à la vie (chacun à son rythme, il y a pas de recettes miracles). Là aussi, je n’oublie pas les personnes qui ne peuvent pas être de nature optimiste et positive. En effet, parfois, selon les caractères, ce n’est pas possible ou en fonction de là où on en est, du stade de la maladie, ce n’est pas aussi simple. Lorsque c’est possible, gardez votre force, votre courage, votre sourire, votre optimisme, c’est précieux pour traverser une telle épreuve !
Et comme je le disais un peu plus haut, la maladie nous transforme mais aussi en bien et apporte des choses positives. J’envoie toutes mes ondes les plus positives à toutes les personnes en soin pour un cancer ou tout autre maladie.
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