Vivre avec un trouble bipolaire
Publié le 28 mai 2020 • Par Léa Blaszczynski
Autrefois appelé “psychose maniaco-dépressive”, le trouble bipolaire touche entre 1 et 2,5 % de la population, soit entre 650 000 et 1 650 000 personnes en France, selon la Fondation FondaMental. Il apparaît majoritairement entre 15 et 25 ans et persiste toute la vie. Dans sa forme la plus typique, le patient alterne des périodes d’exaltation de l’humeur (épisode maniaque) et de fléchissement de l’humeur (épisode dépressif). L’Organisation mondiale de la santé le place au 6e rang mondial des handicaps.
Comment reconnaître les symptômes d’un trouble bipolaire ? Quelles sont les caractéristiques d’un épisode de manie ? Comment prendre en charge les patients ?
Quelle est la différence entre des changements d’humeur “normaux” et un trouble bipolaire ?
Selon Dr David Gourion, psychiatre, les changements d’humeur “normaux” ne vont pas entraîner d’impact fonctionnel dans la vie de la personne. Il s’agit donc d’observer si ces changements d’humeur empêchent la personne de travailler ou de s’occuper de sa famille, s’ils l’empêchent de “fonctionner”.
Qui peut établir un diagnostic de trouble bipolaire ?
C’est un diagnostic très difficile car il n’y a pas de marqueurs biologiques. Le délai entre le premier épisode et le diagnostic est en moyenne de 10 ans. Il y a toutefois des “indices” : une dépression qui commence très tôt avant l’âge de 20 ans, des dépressions qui commencent très vite et qui s’arrêtent très vite, une mauvaise réponse aux antidépresseurs, une très forte saisonnalité du trouble… Selon Dr David Gourion, psychiatre, c’est un problème vraiment complexe car il ne faut pas sous-diagnostiquer des personnes qui ont un trouble bipolaire en les traitant avec des antidépresseurs mais il ne faut pas non plus sur-diagnostiquer en prescrivant des traitements régulateurs de l’humeur à des personnes qui n’en ont pas besoin. Un médecin généraliste peut donc évidemment poser ce diagnostic mais les patients ont souvent recours à un psychiatre.
Un épisode ne peut-il pas “aider” au diagnostic ?
Généralement, les bipolaires non diagnostiqués consultent lors des états dépressifs. Ils se voient ainsi prescrire des antidépresseurs. Or, ceux-ci sont des faux amis car ils vont soulager à court terme mais aggraver à long terme en déclenchant une crise maniaque ou d’euphorie. Le problème étant que ces épisodes sont généralement très bien vécus par le patient donc il est rare qu’il revienne consulter à ce moment. Il s’agit donc d’un cercle vicieux. C’est souvent l’entourage qui repère quelque chose.
Comment est vécue une phase maniaque ?
Chez les bipolaires de type I, elle est synonyme d’un sentiment de surpuissance et de détachement de la réalité. Le patient se croit capable de tout, il multiplie les projets avec une imagination débordante et ne dort presque plus. Toute cette agitation s’effondre d’un coup, entraînant un épisode de dépression. Chez le bipolaire de type II, les phases sont moins intenses. On parle alors de phases “hypomaniaques”, elles sont de plus courte durée et ne déconnectent pas complètement la personne de la réalité. Le patient est également dans une forme de toute-puissance, il souhaite maîtriser la situation. Il a la certitude de détenir la vérité et d’avoir des fulgurances de la pensée et de l’intelligence. Ces crises plus “discrètes” sont toutefois plus délicates à déceler et elles peuvent ainsi avoir un impact dramatique sur la vie des patients. Une personne qui s’offre une session shopping inconsidérée ou qui a un comportement désinhibé en soirée peut être “excusée” par son entourage jusqu’à “la fois de trop”.
Quelles sont les traitements possibles ?
Il est vital d’être pris en charge car 20% des patients bipolaires sans traitement se suicident. Le lithium reste le traitement de référence avec 70% des patients qui sont de bons répondeurs. Reste 30% qui sont non-répondeurs ou répondeurs partiels et pour lesquels se sont développées des stratégies de combinaisons thérapeutiques. Il existe donc un arsenal thérapeutique aujourd’hui qui s’est considérablement enrichi avec notamment les molécules anti-épileptiques et les antipsychotiques atypiques. Mais la bonne association peut prendre du temps à être trouver. La psycho-éducation du patient et de son entourage est essentielle tout comme les différents types de psychothérapies.
Quels signes peuvent indiquer la survenue d’un épisode ?
Les troubles du sommeil sont un marqueur très sensible car il s’agit souvent du premier symptôme d’un épisode. Et ils sont également un facteur déclenchant. Les patients qui font une nuit blanche pour des raisons professionnelles ou personnelles vont parfois déclencher un épisode. Il est donc essentiel de mettre en place une régularité du sommeil en respectant une bonne hygiène de vie. Les exercices de méditation ou la sophrologie peuvent ainsi aider. L’alcool et le cannabis sont, en revanche, à éviter.
La bipolarité est-elle héréditaire ?
Effectivement, il y a une composante génétique. Et on retrouve généralement des antécédents de bipolarité ou de troubles de l’humeur chez les apparentés. Les tentatives de suicide sont également un marqueur. Concernant les enfants d’un patient bipolaire, ils ont un risque de l'ordre de 5 à 10% d’être eux-mêmes bipolaires. Il convient donc de rester vigilant afin de déceler d’éventuels signes. Mais ces enfants ont également 90 à 95% de n’avoir absolument rien, insiste le Dr Gourion.
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