Cancer : l'impact de l'entourage
Publié le 6 févr. 2018 • Par Léa Blaszczynski
A l’occasion de la Journée Mondiale contre le Cancer le 4 février dernier, Carenity a souhaité connaître le ressenti de ses membres* et comprendre l’impact de leurs proches durant cette épreuve.
Le cancer s’abat souvent sur ses proies sans prévenir. D’ailleurs, 56% de nos membres étaient seuls lors de l’annonce du diagnostic. Pour certains, il s’agissait d’un choix : "Je ne voulais pas être accompagnée" ; "Les problèmes de santé, c’est délicat, il vaut mieux être seul tant qu’on comprend le médecin". Pour d’autres, il s’agissait d’une surprise : "Je ne m’attendais pas à un tel diagnostic. Pour moi, c’était un kyste anodin" ; "C’était un examen de routine…"
D’autres encore expliquent leur solitude par une rupture, une séparation, un divorce. En effet, parmi les 44% des membres Carenity qui étaient, eux, accompagnés, 77% l’étaient par leurs conjoints. Et ils avouent que cette présence les a aidés à entendre le diagnostic (énormément pour 54% et beaucoup pour 25%).
Car une fois le couperet tombé, beaucoup de sentiment se mêlent chez ces nouveaux patients : la peur (38%), la solitude et la confusion (25%), l’injustice et la colère (24%), le choc (19%). Pourtant, 41% ont immédiatement ressenti une détermination à combattre la maladie.
La réaction des proches
Dans cette bataille, tous comptent sur leurs familles, leurs amis et leurs médecins pour les soutenir. Mais les réactions des proches sont en général confuses : gêne, tristesse, colère, panique, pitié, peur, sollicitude, confiance. Et si beaucoup de nos membres parlent du soutien, de la bienveillance et de l’amour qui les a entourés, d’autres confessent leur déception et leurs blessures. "La plupart de mes proches m'a soutenu mais d'autres personnes de ma famille m'ont laissé tomber, j'étais un boulet pour eux" ; "Mes proches ont relativisé et ne m'ont pas spécialement soutenu" ; "Mon conjoint a pris une attitude très pessimiste et c'est presque moi qui devais le réconforter" ; "J'ai eu des réactions très négatives dans l'environnement professionnel, voire même de rejet... On m'a dit que j'étais une charge et que mon absence pour maladie de longue durée avait entraîné une surcharge de travail pour mes collègues et une désorganisation de l'entreprise..." ; "Ma famille n'a pas compris ma colère et ma tristesse et m'a laissée assumer seule. Mes collègues m'ont soutenue".
Et malheureusement, l’isolement des patients n’aide pas ceux qui se sentent déjà seuls dans ce combat. Parmi nos membres, seulement 15% ont participé à des groupes de paroles. Pour les autres, les raisons sont multiples : "Pas envie de raconter ma vie" ; "La peur de certains, leur détresse, le manque de confiance, l'abandon m'aurait mis mal à l'aise" ; "J'ai tendance à me replier sur moi-même lorsque j'ai un coup dur" ; "J'ai souhaité gérer seule de peur de m'effondrer". Et surtout, pour 38%, il s’agit simplement d’un manque d’opportunité : "Je ne savais pas que cela existait" ; "Rien n'était organisé dans ma région et je le regrette".
Les mots qui blessent et ceux qui réconfortent
Beaucoup de nos membres évoquent souvent un manque d’empathie, qui n’est parfois d’ailleurs que de la maladresse. "On me disait : « T'es forte ça va aller »" ; "Quelques amies n’ont pas compris que je sois moins dispo pour leurs petits bobos quotidiens..." ; "Mes proches semblaient ne pas se rendre compte de ma fatigue ou voulaient l'ignorer" ; "Une proche a rigolé en me voyant avec la perruque".
Et certaines phrases terribles sont restées ancrées en eux : "On va tous mourir un jour" ; "Un cancer du sein, ça va, c'est pas le pire, il se soigne bien celui-là" ; "Je viendrai te voir quand tu seras moins impressionnante ! (perte de cheveux et visage marqué)" ; "Arrêtes de jouer la carte cancer !" ; "A mes enfants : « Mon dieu, ta maman a un cancer tu as peur qu’elle meure ? »" ; "Tu as été opérée, tu es guérie".
Alors que le réconfort et le soutien sont à la fois si simples et si essentiels. La plupart de nos membres ont ainsi mis en lumière les jolies choses que leurs proches ont fait pour eux. "Certains ont fait une enveloppe afin que je puisse m'acheter une perruque ou un turban. Cela m'a beaucoup touchée" ; "Des paroles, des petites attentions au quotidien qui nous réconforte" ; "Des visites, des appels tout au long de la maladie, pas juste au début".
Et des phrases indélébiles qui réchauffent le cœur : "Penses à toi d’abord, repose toi, appelle quand tu veux" ; "Tu es forte et tu te bats comme un chef" ; "Tu es belle".
Et aujourd’hui ?
Certains essaient d’oublier : "Le cancer a été une épreuve, il n’est pas ce que je suis" ; "Je me suis retirée des pages Facebook sur lesquelles je m’étais inscrite pour pouvoir passer à autre chose". Mais la plupart des patients vivent avec la peur d’une récidive. Une crainte ravivée à chaque examen : "J’ai peur, je souffre de crise d'angoisse et d'insomnie. Je pense très souvent au prochain contrôle."
Et une fois encore, l’attitude des autres peut avoir un impact dévastateur : "Le cancer ayant été guéri, les gens ont oublié que j'avais été malade" ; "Quand on a eu un cancer, tout le monde se sent obligé de nous parler de leur proche ou ami qui a ça aussi même s'il ne s'agit pas du tout du même cancer..."
Etant donné qu’après un cancer, un patient sur cinq souffrirait de symptômes assimilables à ceux d’un stress post-traumatique, il est urgent de prendre soin de nos patients pendant et surtout après leur combat contre la maladie.
* Parmi tous nos répondants, 46% souffraient notamment d’un cancer du sein, 9% d’un cancer de la prostate, 8% d’une tumeur neuroendocrine, 6% d’un cancer de la thyroïde et 5% d’un cancer colorectal.
* Chiffres Sondage Carenity – Journée mondiale du cancer, 2018
Et vous, comment avez-vous souffert du comportement de vos proches ?
Enquête Carenity janvier 2018