Malgré mon combat contre la maladie de Lyme, j'ai des projets plein la tête !
Publié le 16 nov. 2016 • Par Léa Blaszczynski
Découvrez le témoignage de Laurence, membre Carenity atteinte de la maladie de Lyme, qui nous raconte son parcours et son combat.
1 - Bonjour Laurence, pourriez-vous vous présenter ?
Bonjour, je m'appelle Laurence, j’ai bientôt 40 ans et je suis mariée avec 2 enfants.
J’ai de multiples expériences professionnelles et associatives très enrichissantes, également des diplômes, histoire de faire joli sur le CV ;)
J'ai dû arrêter de travailler en janvier 2006 pour une maladie que je n'ai finalement pas.
Je suis la première personne à être reconnue en France en Invalidité 3 avec séquelles dues à la Maladie de Lyme et Co-Infections d'autres bactéries vectorielles à tiques. Je suis reconnue MDPH depuis 1995 pour une malformation congénitale sur l'ensemble du canal lombaire. Je suis inopérable.
2 - Comment se manifeste la maladie de Lyme ?
La maladie de Lyme est très difficile à décrire étant donné le nombre incalculable de manifestations symptomatiques. Si je devais résumer : douleurs chroniques partout et surtout au niveau des articulations et des muscles, paralysies, mouvements involontaires incontrôlables, maux de têtes, pertes de mémoire, etc. Étant en phase 3, j'ai des atteintes neuro-musculo-squelettiques et cardiaques.
La maladie de Lyme est surnommée « La Grande Imitatrice », car elle mime à merveille beaucoup de maladies graves de par ses symptômes d'où la très grande difficulté, surtout en France, de poser le diagnostic de LYME. Elle est confondue avec la SEP, la SPA, la fibromyalgie, la maladie d’alzheimer, l'autisme chez l’enfant, et tant d'autres qui laissent en errance médicale bon nombre de patients.
3 - Vous avez vécu 35 ans avec la maladie de Lyme sans le savoir. Comment êtes-vous parvenue à faire face à la maladie malgré l'absence de traitement ?
Suivie par de nombreux médecins, j'ai toujours été considérée comme une "énigme". Ayant trop de symptômes différents, j'ai eu le droit à toutes les maladies, avec tous les examens revenant négatifs, sauf pour les prises de sang où toutes montraient que j'étais immuno-défaillante.
Mais comme les médecins français travaillent peu en collaboration avec leurs patients, cela ne pouvait-être dû qu'à la suite d'un "rhume".
À la question : comment ai-je pu faire face à la maladie en l'absence de traitements adéquats ? Sincèrement, je me pose encore la question, mais je vais tenter d'expliquer tout de même.
D’une part, c’est grâce à mon mari qui m'a soutenue et supportée pendant plus de 11 ans (beaucoup seraient déjà parti depuis longtemps, mais pas mon mari) et d’autre part la ténacité, la volonté de savoir et de comprendre et ne pas accepter d'être étiquetée.
Cela fait partie de mon caractère, les valeurs que mes grands-parents m'ont transmises : "ne pas rester sur ses acquis", "aide toi et le ciel t'aidera", etc. Mes grands-parents ont subi la Guerre, dont un de mes deux grands-pères déportés (STO) et l'autre emprisonné 5 ans et 1 jour. J'ai appris avec eux qui je suis et d'où je viens. Et je ne l'oublie pas.
4 - Comment avez-vous réagi lors du diagnostic des médecins ?
Le diagnostic s'est fait en 3 parties. Le premier rendez-vous avec un médecin était absolument génial : un bon médecin qui travaille en équipe avec son patient, 1h30 de consultation, un test Horowitz de +147 (si +47 alors suspicion de Lyme - test non encore reconnu en France), et une prise de sang à faire.
Puis les résultats de la prise de sang sont arrivés, 4 pages recto/verso… Je me suis écroulée en larme dès la première page.
L'attente du diagnostic du médecin semblait si longue... Le diagnostic était plus grave que ce que j'avais conclu. Le ciel nous est tombé sur la tête une troisième fois. L'épée de Damoclès n'était plus au-dessus de ma tête mais déjà bien enfoncée…
Mon mari, ma famille et moi, avons eu beaucoup de difficultés à "accepter" ce qui était inacceptable. Nous avions déjà commencé une thérapie avec une psychologue extra, nous continuons encore aujourd'hui et nous n'essayons plus d'accepter car ce n'est pas possible. Mais nous tentons comme nous pouvons de vivre avec cette maladie.
J'ai fait un AVC le 30 octobre dernier, et je suis passée en invalidité 3 le 13 septembre 2014. Je rentre de nouveau en centre de rééducation physique et fonctionnelle et je passe de mon fauteuil à mes cannes ergonomiques, de mes cannes ergonomiques à mon canapé ou à mon fauteuil devant mon ordinateur.
Autre chose, comme dit précédemment, je suis la première personne à être reconnue en Invalidité 3 avec séquelles dues à la Maladie de Lyme et Co-Infections. Je pense qu'il s'agit d'une grande avancée pour les patients, en espérant que les médecins, politiciens, médias, grand public prennent conscience de la mesure de la gravité de cette épidémie qui touche l'ensemble de l'hémisphère Nord de notre planète !
5 - Pour vous, quel est l'aspect le plus difficile à gérer dans votre quotidien ?
L’aspect le plus dur est de ne plus pouvoir réaliser les gestes simples de la vie quotidienne et même mes passions. C'est une frustration que nous essayons, mon mari et moi, de tourner à la dérision mais cela ne marche pas toujours ;) C'est un métier que de vivre avec une personne handicapée. Il ne faut pas l'oublier, les proches aussi souffrent terriblement d'être impuissant face à tout ça.
Chapeau à mon mari qui est mon aidant familial, chapeau à tous les aidants familiaux !
Le plus dur également est de se sentir inutile physiquement pour notre famille. Je me vois comme un fardeau et j'ai cette sensation lorsque je ne me sens pas bien moralement, que j'ennuie ma famille. Heureusement, cela ne dure pas trop :)
6 - En quoi Carenity vous aide dans votre quotidien ?
Carenity est une chance ! J’ai fait de nombreux sites avant, même des réseaux sociaux. Je les ai tous quitté avec bonheur ! Carenity est très différent, son concept est très ingénieux, le tableau de bord, le listing et avis des médicaments où nous pouvons donner des conseils, l'écoute à n'importe quelle heure, la possibilité d'écrire dans le calme pour moi et réussir à me concentrer.
LYME a de graves répercussions sur la mémoire, la concentration, l'espace ... Carenity me donne des "rendez-vous" que je ne veux pas oublier :)
Je ne poste pas tant que cela, sauf lorsque la machine est partie, et là je ne m’arrête plus. A vrai dire, ce qui me stoppe, c'est ma vision qui se floue très vite. J'aime l'ambiance et la simplicité du site dans le sens où tout est à notre disposition.
7 - Quels sont vos projets pour combattre la maladie ?
J'ai des projets plein la tête. C'est un gros souci car j'ai toujours eu plein de projets que je réussissais. Maintenant, seule, ce n'est plus possible de les réaliser.
Entre autres, je réalise actuellement un livre pour enfants de prévention sur les tiques qui devrait être, suivant les accords, distribué dans les écoles gratuitement grâce à la synergie d'une amie illustratrice et mon super mécène :)
Je suis également en train de créer mon association que je souhaite ouverte d'esprit, avec pleins d'initiatives nouvelles et spontanées, des événements partout et pour tous en faisant de belles fêtes, sans dictats, une vraie association, pas un « trophée ».
L'idée générale est d'informer, sensibiliser, former les personnels soignants, arrêter les combats de "coqs" et commencer à bien travailler en bonne intelligence entre médecins et patients.
Comme ma grand-mère me disait : "Quand on veut on peut".
8 - Auriez-vous un message à faire passer aux autres membres Carenity ?
Un message aux patients et membres de Carenity : SOYEZ ACTEUR DE VOTRE VIE.
Vous seul connaissez vos symptômes, vos douleurs et personne de toute façon ne pourra se mettre à votre place.
Bon ou mauvais jour : battez-vous et autorisez-vous aussi à vous plaindre, même face à un mur de pierre. Au moins vous êtes sûr de ne pas déranger votre famille, et en plus cela fait un bien fou ! C'est la méthode que j'utilise tous les jours, je grogne, je me plains tous les jours mais en faisant en sorte de ne pas être entendue, afin d'éviter de passer pour celle qui se plaint toujours. On connaît tous ça…
Et arborez, après vous être bien défoulée, un beau et vrai sourire, parce que le bonheur, mine de rien, il est partout tout autour de nous : un oiseau, un lever ou coucher de soleil, une petite tempête à faire frémir les enfants, les arbres qui sont en sommeil, la verdure et les fleurs en toutes saisons, un sourire d'un inconnu, un enfant, une couleur, etc…
Comme disait Brel sur les gens du Nord : « le soleil est dans notre cœur ».
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