Diabète de type 2 : “Le confinement a été une vraie descente aux enfers...”
Publié le 29 sept. 2021 • Par Candice Salomé
Pomme123, membre de la communauté Carenity en France, est atteinte de diabète de type 2. Elle revient sur son vécu de la maladie pendant le premier confinement lié à la pandémie de Covid-19.
Découvrez vite son histoire !
Bonjour pomme123, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions.
Tout d’abord, pourriez-vous nous en dire plus sur vous ?
Je m’appelle Gisèle, je suis retraitée des hôpitaux où j’ai exercé pendant 40 ans comme infirmière et cadre hospitalier.
J’ai 72 ans, je suis veuve depuis 1 an et demi. Je vis, depuis un an, en résidence séniors dans un petit studio en rez-de-chaussée avec un petit jardinet et un salon de jardin pour prendre l’air. Bref, c’est plutôt sympa.
Mes passions sont : la photo, la peinture, le dessin, la lecture, la musique, l’écriture, les jeux de sociétés, que j’ai appris ici, dans ma nouvelle résidence.
Je participe à tous les ateliers : mémoire, chorale, gymnastique douce, marche…
Vous êtes atteinte de diabète type 2, pourriez-vous nous dire quand vous avez été diagnostiquée ? Comment la maladie s’est-elle manifestée dans votre vie ?
Ce diabète s’est installé à bas bruit, j’étais prédiabétique de 1975 à 1997.
Je pensais qu’avec le régime sans sucre ça allait se maintenir longtemps. Mais des évènements malheureux de la vie (le suicide de mon premier mari) furent un choc émotionnel violent.
Il a fallu se relever et digérer tout cela et élever mon fils seul.
J’ai travaillé de nuit et j’avais un rythme biologique inversé. Mon corps a commencé à ne plus être d’accord et, en 1997, le diagnostic est tombé : fatigue, épuisement, faim, soif, infections à répétition (furoncles, bronchites, infections urinaires…) qui ne guérissaient pas, des hyperglycémies et des hypoglycémies, des crampes d’estomac, des sueurs parfois. C’était donc officiel, j’étais diabétique.
Comment avez-vous réagi à l’annonce du diagnostic ?
J’ai soigné des patients du diabète, je pensais passer entre les mailles du filet, et que ça n’arrivait qu’aux autres. Cette prise de conscience a été rude, j’étais en colère après moi-même malgré les prémices et ce déni au départ… perte de confiance, repli sur moi, pourquoi moi ?
C’est ainsi que le diabète est entré dans ma vie définitivement. Il est devenu mon compagnon de route de tous les jours, mon baromètre aussi qui me dit stop.
J’ai fini par accepter ma condition de diabétique. C’est un lourd travail sur soi, c’est faire le deuil de son ancienne vie et d’accepter toutes ses contraintes, je me suis privée de sorties au restaurant, trop de tentations… J’ai encore le goût du sucré et je dois me ressaisir.
J’ai été mise sous insuline rapidement : bolus d’insuline rapide à chaque repas et 1 lente au coucher. Le diabétologue m’a très rapidement expliqué les piqures et puis “débrouillez-vous”. Je me suis renseignée seule sur les complications pendant longtemps, je me sens fatiguée et diminuée.
Qu’avez-vous pensé de votre prise en charge ? En étiez-vous satisfaite ?
La prise en charge a été tardive, peut être 4 ans après. J’ai demandé une hospitalisation de semaine pour étudier et me guider pour les dosages d’insuline.
J’ai eu un bon protocole pour lever mes doutes et mes questionnements. J’ai étudié la diététique et la composition des repas (grâce à des cours), les complications du diabète et beaucoup d’informations (ALD). Ce stage a été bénéfique, j’ai repris confiance en moi.
On a besoin d’être accompagné pour ces lourdes maladies chroniques. Un stage comme cela n’est pas superflu, je suis devenue actrice de ma maladie. Parfois, à la résidence, il y a des loupés au niveau des repas mais dans l’ensemble ça va.
En 2020, l’épidémie du Covid-19 fait des ravages et la France connait son premier confinement au mois de mars ; que vous évoque cette période ? Comment l’avez-vous vécue à titre personnel ?
C’est la descente aux enfers, l’année de tous les chocs de ma vie.
Après 3 mois d’hospitalisation pour une fracture de l’épaule, mon compagnon est placé en EPHAD, en début du confinement, et décède du Covid-19, 3 semaines après, sans avoir pu l’accompagner, dans des conditions inhumaines…
Je culpabilise, je suis bouleversée, un chagrin immense… Ce choc a déséquilibré mon diabète, je me suis sentie fragilisée. J’ai dû augmenter mes insulines, pas d’exercices, pas moyens d’avoir des consultations à domicile. Les médecins ne se déplaçaient plus. J’ai géré comme j’ai pu, le confinement nous laisse des séquelles physiques (arthrose, fonte musculaire, prise de poids, mal-être, repli sur soi, manque de paroles, isolement, solitude…).
Je l’ai mal vécu. Mon fils m’a dit : “vend ta maison” et il m’a installé à côté de chez lui en résidence séniors. J’étais à nouveau déracinée, j’ai dû faire un tri et vider ma maison et me séparer de beaucoup de souvenirs, maintenant ça va, mais toujours pas de spécialistes médicaux en pleine campagne.
Quel a été l’impact du confinement sur votre prise en charge ? Est-ce que cela a eu des répercussions sur votre état de santé ?
Ce confinement a eu un impact tant physique que psychologique : découragement, déprime, isolement en chambre, l’ennui, le grignotage parfois avec les conséquences sur le poids et le diabète…
C’était long et néfaste pour moi, le médecin traitant m’a renouvelé mes ordonnances sans plus approfondir ; il aurait fallu des vidéos-consultations, allo écoute, ou encore des vidéos avec les familles. On a souffert du manque de contact, d’être ensemble, de voir les petits enfants...
Pouvez vous nous dire, avec du recul et selon vous comment les choses auraient pu être améliorées ?
Cela nous est tombé dessus comme ça, si vite… Ici, on nous a protégé du virus avec des règles drastiques (protocole de l’ARS).
Consultation vidéo, j’en ai eu une qui s’est bien passée, que j’ai organisée.
Le psychologue est venu (groupe de parole) pour évacuer le stress, le mal être et nous permettre de positiver.
Les activités auraient dû être maintenues (chorale, gym, mémoire, etc.).
Les réseaux sociaux, les mesures d’hygiène (masques, gel et distanciation), malgré cela la Covid-19 est entrée dans la résidence par les intervenants extérieurs.
Comment envisagez-vous l’avenir actuellement ? Quels sont vos projets ?
Nous sommes tous vaccinés. Mon repas pour diabétique est pris en charge par la cuisine, c’est mieux. J’aimerais trouver des spécialistes médicaux et accepter d’être là malgré le choc à l’arrivée où j’ai vu les déambulateurs.
J’ai été projeté dans le 4ème âge d’un coup, les résidants ont entre 85 à 96 ans, j’en ai 72, l’image de la vieillesse est triste avec toutes ses pathologies ; vivre du mieux que je peux et continuer mes passions de peinture, marcher avec mes bâtons de marche, garder le moral !
Que pensez-vous des plateformes d’échanges entre patients comme Carenity ? Est-ce que cela vous a été utile pendant cette période de confinement ? Quels bénéfices en avez-vous tirés ?
J’ai découvert entraide, écoute, partage et réconfort. Ces adhérents m’ont portée quand j’ai perdu mon compagnon, mon désarroi était si grand, et ils m’ont permis de ne pas faire de bêtises et de passer ce cap de douleur et de perte. Je les remercie pour leur écoute, leur patience, leur bienveillance. C’est comme un SOS amitié, ma douleur s’apaise et puis, aussi, j’ai eu de bons conseils pour le diabète.
Quels conseils pourriez-vous donner aux membres de Carenity ?
De ne pas faire n’importe quoi avec le diabète (pas de jeûne par exemple), de suivre les consignes qui vous ont été données, faire un contrôle glycémique avant le repas, noter sur un carnet de surveillance, faire les prises de sang tous les 3 mois, respecter les heures de repas, connaître les complications et signes d’hypo ou d’hyper, s’activer, s’occuper, marcher, faire de la gymnastique, et puis, il ne faut pas être trop dur avec soi-même, s’octroyer un carré de chocolat le dimanche par exemple. Faites-vous plaisir de temps en temps, vivez l’instant présent !
Un grand merci à pomme123 pour son témoignage !
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