Cancer du sein : “Être enceinte et avoir un cancer, c’est possible, je l’ai fait !”
Publié le 20 oct. 2021 • Par Candice Salomé
Justine est enceinte de 14 semaines lorsqu’elle apprend qu’elle a un cancer du sein. Entre peurs et dépassement de soi, elle mènera ce combat avec beaucoup de courage. Ressentant le besoin de parler de son parcours, elle partage son quotidien sur Instagram dans le but d’aider et de sensibiliser au cancer du sein. Elle se livre dans son témoignage pour Carenity.
Découvrez vite son histoire !
Bonjour Justine, vous acceptez de témoigner sur Carenity et nous vous en remercions.
Tout d’abord, pourriez-vous nous en dire plus sur vous ?
Je suis Justine, j’ai 35 ans et je suis en couple depuis 14 ans avec Jérémy. Je suis maman d’un petit garçon Noa de 4 ans et d’une petite fille Nina qui aura 4 mois le 09 octobre 2021. Nous vivons en région parisienne dans le 91.
Vous êtes atteinte du cancer du sein. Pourriez-vous nous dire quand avez-vous été diagnostiquée ? Qu’est-ce qui vous a alertée/poussée à consulter pour le cancer du sein ? Qu’avez-vous ressenti à l’annonce du diagnostic ?
A la mi-décembre 2020, en appliquant de l’huile anti-vergeture sur le ventre, étant donné que j'étais enceinte à ce moment-là, je le faisais tous les soirs mais, ce soir-là, je décide de m’en appliquer sur la poitrine également. Je suis assez frileuse, j’arrête assez rapidement, n’étant pas sûre de la composition, puis je décide tout de même de me palper. Je ne le faisais pas auparavant. Je ne pourrais pas dire ce qui m’a poussée à le faire ce soir-là mais cette autopalpation m’a sauvé la vie !
Le lendemain, j’évoque cette boule à ma sage-femme, lors de mon rendez-vous mensuel prévu pour ma grossesse. Elle me prescrit une mammographie et une échographie.
Le 21 décembre 2020, on m’annonce que j’ai un cancer du sein. J’étais enceinte de 14 semaines, nous venions d’apprendre le sexe de notre bébé, c’était une petite fille.
Je me souviendrais à vie de ce que j’ai ressenti, c’est toujours autant d’émotions d’en parler, je pense qu’on est marqué à vie. Ça a été un vrai tsunami tant on ne s’y attendait pas. J’avais l’impression qu’on pressait un pistolet sur ma tempe. J’ai pensé directement à mon fils qui avait 3 ans, que je ne pouvais pas mourir, le laisser si petit sans maman, j’étais au fond du trou. J’ai pensé à mon bébé, à ma fille in utero, j’étais morte de trouille.
De quel type de cancer du sein êtes-vous atteinte ?
Je suis atteinte d’un cancer du sein carcinome canalaire infiltrant hormonodépendant avec atteinte ganglionnaire (sein droit 5 tumeurs et 3 ganglions de touchés sur 6 enlevés).
Quel traitement avez-vous reçu ?
J’ai eu une mastectomie le 7 janvier 2021, j’étais alors enceinte. Après l’opération, j'ai eu 16 chimiothérapies qui ont débuté le 08 février 2021, dont 8 où j’étais également enceinte. J’ai accouché le 09 juin 2021 et je suis actuellement en radiothérapie qui a débuté le 27 septembre 2021 (25 séances de rayons à faire).
Par la suite, j'aurais de l’hormonothérapie pour 5 à 10ans.
Vous avez également subi une ablation. Pourriez-vous nous dire pourquoi ?
En effet, la mastectomie était nécessaire car, étant enceinte, je ne pouvais pas faire de PET-scan. Ils ont donc décidé d'enlever mon sein car il y avait en plus 3 tumeurs, petites mais distantes.
Finalement, après analyses du sein enlevé, il y avait 5 tumeurs ainsi que 3 ganglions touchés sur 6 enlevés. Je n’ai donc aucun regret concernant cette ablation même si, bien-sûr, j’aurais préféré ne jamais être malade et rester entière.
Vous avez accouché d’une petite Nina en juin dernier. Pourriez-vous nous parler de votre grossesse ? Avez-vous connu certaines complications liées à la maladie et aux traitements ?
Ça a été très compliqué psychologiquement, c'est comme si ma tête était scindée en 2. D’un côté, on veut investir sa grossesse et, d’un autre côté, on essaye de se protéger.
J’ai eu terriblement peur pour elle, pour nous. Ce n’était pas évident d’aller en chimiothérapie enceinte, de vivre tout ça enceinte. Quand j’ai dû faire ma mastectomie, il y avait des risques pour moi et des risques pour ma fille.
J’avais écrit une lettre pour mon fils au cas où ça se passerait mal. J’avais si peur. Au réveil, ma fille était toujours là. J’ai remercié la vie. C’était un miracle pour moi. J’avais perdu mon sein mais j’étais là et ma fille aussi. Tout était secondaire.
La veille de mon opération, ma fille a bougé pour la première fois et, au réveil, j’ai ressenti à nouveau des petits coups de pieds.
Nous avons une relation fusionnelle qui s’est vraiment instaurée in utero. Ce qu’on a traversé ensemble, c’est plus qu’une relation mère-fille, c’est une relation de deux personnes qui combattent ensemble ! Il n’y a rien de plus fort !
Physiquement, j’ai eu beaucoup de chance, je remercie encore la vie et mon corps pour ça.
Cela m’a permis de me découvrir, moi qui pensais souvent n’être capable de rien… Je l’ai fait et je suis fière de nous. Et le parcours n’a vraiment pas été évident.
Vous êtes active sur les réseaux sociaux sous le pseudo Mon combat contre le cancer 2en1. Était-ce le cas auparavant ? Pourquoi avez-vous décidé de parler de votre combat face à la maladie sur Instagram ?
J’avais déjà un compte personnel privé sur Instagram où je partageais des instants de ma vie. J’ai eu ce besoin d’échanger à une période où je pensais ne jamais avoir d’enfants.
Ça a été riche, j’aime la communauté Instagram pour ça ! J’y ai fait de superbes rencontres, je partageais ma vie de maman, l’évolution de mon fils Noa, ma nouvelle grossesse…
Quand j’ai appris mon cancer, j’ai eu un besoin de créer un nouveau compte, je ne voulais pas partager sur mon compte initial. Je voulais scinder mon cancer et ma vie privée.
J’ai ressenti le besoin d’écrire ce que je vivais pour moi et pour les autres. Je me suis sentie tellement seule, j’avais comme l’impression d’être une extraterrestre. Je me suis dit que ça pourrait aider d’autres personnes et, si c’était le cas, j’en serais heureuse.
J’ai fait de superbes rencontres, j’ai eu beaucoup de soutien ! J’ai voulu donner aux autres car j’ai beaucoup reçu et je me suis vite rendu compte qu’il y avait beaucoup de choses à faire ! Je me suis dit que je pouvais potentiellement faire passer des messages et participer au fait que les choses puissent changer.
Vous avez également enregistré un podcast pour la chaîne « Naître princesse, devenir guerrière ». De quoi parlez-vous dans ce podcast ? Pourquoi avoir fait le choix de témoigner ?
Delphine Rémy m’a proposé de témoigner et j’ai découvert cette femme forte, tellement inspirante, une vraie humaine. Ça m'a beaucoup plu de faire ce podcast.
Dans la même optique que mon compte Instagram, j’ai accepté car je suis persuadée que ça peut aider. Être à l’origine d’une autopalpation et sauver une vie, aider une personne en souffrance, lui dire qu’elle n’est pas seule, faire savoir au plus grand nombre qu'être enceinte et avoir un cancer, c’est possible !
Diriez-vous que le cancer a changé votre regard sur la vie ?
J’ai connu d’autres coups durs avant mon cancer. Je ne pourrais pas dire qu’il a changé mon regard sur la vie car c’était déjà le cas.
Je savais déjà oh combien la vie était précieuse et la santé importante.
Je dirais que le cancer m’a permis de me libérer un peu plus, d’oser. Clairement, avant je n’aurais pas osé faire ce que je fais sur Instagram, par peur de tout.
Aujourd’hui, je ne me laisse plus autant guider par mes peurs. Et ça fait un bien fou !
Ça m'a aussi permis de comprendre qu’on ne change ni sa nature profonde ni celles de ceux qui nous entourent. J’attendais beaucoup, j’espérais beaucoup… désormais, ce n’est plus le cas. Je vis au présent et non plus dans l’attente.
Le cancer et les traitements qui y sont liés peuvent occasionner de grands changements physiques. Comment avez-vous réussi à apprivoiser votre nouvelle apparence ? Quels trucs et astuces utilisez-vous pour parfaire votre féminité ?
Je n’ai pas eu trop de mal à me faire à cette apparence. Je me dis à chaque fois que c’est temporaire. Et pourtant, ce n’était pas gagné.
A l’annonce, j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps parce-que je pensais mourir et parce-que j’allais perdre mes cheveux.
J’ai décidé de me raser la tête car c’était très stressant de ne pas savoir quand exactement mes cheveux allaient tomber. Je l’ai vraiment bien vécu. C’est fou !
Ce jour-là, je me suis vraiment dit qu’on se fait à tout. A mon retour à la maison, mon fils m’a dit que j'étais trop belle ! J'étais si émue.
Mon fils a été mon pilier. Et mes sœurs de combat m’ont beaucoup aidée. Beaucoup m’inspirent, m'ont permis d’aller mieux. Les voir si fortes, si belles, ça m'a permis de me relever.
Pour les astuces, les Franjynes, la perruque, les turbans, le maquillage… Ça aide à se sentir bien.
Vos proches vous ont-ils soutenu ? Parlez-vous facilement de la maladie à votre entourage ? Comment expliquer la maladie aux enfants ?
Ils ont fait comme ils ont pu et, avec la Covid-19, ça a été compliqué. Je pense, et c’est ce qu’on évoquait avec Delphine Rémy dans le podcast, c’est qu’on se sent toujours seule même entourée, c’est nous qui vivons la maladie.
C’est en cela qu'Instagram ou des groupes Facebook m’ont permis d’aller mieux car j'ai pu échanger avec des personnes qui vivent ou ont vécu la même chose.
J’ai acheté des livres pour préparer au mieux mon fils. Je ne voulais rien lui cacher, c’était important pour moi qu’il sache. J’ai prévenu son école pour que tout se passe au mieux pour lui. Il a toujours été ma priorité.
Enfin, quels conseils pourriez-vous donner aux membres Carenity également touchées par le cancer du sein ?
D’user et d’abuser des réseaux, on y trouve tellement de soutien. De s’écouter et d’écouter ses émotions, de dormir ou de courir, de bouger ou de ne rien faire, de se goinfrer ou faire le jeûne, d’être positif ou de ne pas l’être, de crier ou de ne rien dire, de pleurer ou de rire…
On vit tous le cancer différemment mais on traverse tous les mêmes étapes tôt ou tard. On s’imagine parfois que certaines personnes sont fortes, on se sous-estime souvent. Vous y arriverez. Je ne me suis jamais sentie capable de rien et pourtant je l’ai fait. J’ai eu un cancer pendant ma grossesse !
Encore aujourd’hui, j’ai du mal à me dire que ça m’est arrivé tant cette situation est pour moi complètement dingue.
Un dernier mot ?
Merci de m’avoir proposé de témoigner, si mon témoignage permet à d’autres personnes de se dépister et/ou d’aller mieux, j’en serais heureuse, c’est mon unique but.
Un grand merci à Justine pour son témoignage !
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