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Mode d'emploi pour sauver les antibiotiques

Publié le 28 sept. 2015

Mode d'emploi pour sauver les antibiotiques
Un rapport remis à Marisol Touraine mercredi préconise une série de mesures pour enrayer la progression des bactéries multirésistantes, déjà responsables de 12.500 morts chaque année.
 
La menace d'un retour à un monde sans antibiotiques, agitée depuis maintenant plusieurs années par les spécialistes de l'antibiorésistance, est prise de plus en plus au sérieux par les autorités nationales. Après les États-Unis et le Royaume-Uni, c'est au tour des autorités françaises de se mobiliser contre ce fléau qui cause 12.500 décès chaque année dans l'Hexagone. Des propositions de mesures viennent d'être remises à Marisol Touraine, avec pour ligne directrice que «la lutte contre la résistance bactérienne ne peut plus se limiter uniquement à l'indispensable évolution vertueuse des prescriptions des professionnels de santé».
 
Les experts pilotés par le Dr Jean Carlet, président de l'Alliance contre le développement des bactéries multi-résistantes, avaient pour ligne de mire une réduction de la consommation d'antibiotiques de 25% fin 2016. Les prescripteurs sont bien sûr visés, avec, côté contrainte, la réduction à 7 jours de toute première cure d'antibiotiques en cas de pathologie banale, et, côté incitation, une meilleure valorisation du bon usage des antibiotiques dans la rémunération sur objectifs de santé publique, qui récompense financièrement les médecins adhérant à des pratiques recommandées.
Bien qu'elle ait réalisé des progrès entre 2002 et 2005, la France consomme toujours plus d'antibiotiques que certains de ses voisins: trois fois plus que la Suède, les Pays-Bas ou la Norvège, par exemple. Une mise à niveau avec la moyenne européenne permettrait d'économiser 71 millions d'euros, selon l'Agence du médicament (ANSM), et même 441 millions d'euros en s'alignant avec les pays les plus vertueux.
 
Un statut à part
 
Mais les leviers d'action devront être plus larges, insistent les auteurs. Ils appellent notamment à favoriser l'innovation thérapeutique puisqu'aucune nouveauté significative n'a été mise sur le marché ces 20 dernières années, faute d'un retour sur investissement suffisant aux yeux des industriels. La création d'un statut particulier pour les traitements ou outils de diagnostic innovants permettrait de pallier cet inconvénient, en réduisant les coûts de recherche et développement, en allongeant l'exclusivité d'exploitation en Europe et en adaptant les systèmes de fixation du prix de commercialisation. Le principe a été accepté par Marisol Touraine à réception du rapport, selon le Dr Carlet.
 
Le grand public devra aussi être invité à un usage raisonné des produits désinfectants et des biocides, qui contribuent à l'antibiorésistance. «Il n'y a aucun intérêt à avoir une cuisine ou des toilettes sans bactéries», illustre le Dr Carlet. La possible responsabilité des déversements industriels est aussi pointée, sans mesures concrètes associées.
 
De fait, des observateurs extérieurs déplorent le flou et la timidité du rapport. Le SPQR, think tank mobilisé contre le mésusage des antibiotiques, le juge «insuffisamment contraignant», notamment sur le recours à des tests rapides d'orientation diagnostic (TROD), qui permettent de distinguer en quelques minutes angine virale et bactérienne, ou une pneumonie d'une bronchite, et qui sont au contraire fortement plebiscités dans l'expertise remise au gouvernement britannique.
 

Le Figaro Santé

3 commentaires


rickurz
le 28/09/2015

bonjour

j'ai du mal à comprendre que ce rapport ne parle pas des autres méthodes de soins comme les phages, très utilisé dans certains pays et apparemment totalement ignorés chez nous (lobby pharmaceutiques ?).

C'est pourtant peut être la solution  remplacant les antibiotiques ou limitant leur usages


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Utilisateur désinscrit
le 28/09/2015

@ricurz

Bonjour Rickurz,

L'emploi des bactériophages pour détruire les bactéries pathogènes me semble être excellent. Il est probable que l'utilisation de virus vivants et virulents soit encore considérée avec méfiance en France, même si ces virus ne s'attaquent qu'aux bactéries. L'utilisation thérapeutique des bactériophages serait apparue en Union soviétique, dans l'entre-deux-guerres. Ceci explique son emploi actuel dans en Europe orientale, notamment en Russie.

Nous disposons en France des capacités techniques pour fabriquer de grandes quantités de bactériophages, mais les autorités sanitaires exigent une démonstration d'efficacité et de sécurité d'emploi en bonne et due forme, selon la réglementation européenne. Depuis des années, il est question de réaliser des essais cliniques ad hoc, mais le financement ne suit pas (les laboratoires pharmaceutiques ne sont pas intéressés).

Ces difficultés sont à rapprocher de celles longtemps rencontrées dans l'emploi des sangsues pour nettoyer les plaies des tissus morts et améliorer l'apport de sang dans les tissus. Le dogme de la pureté moléculaire nous éloigne peut-être de solutions thérapeutiques simples et efficaces.

Cordialement.


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Utilisateur désinscrit
le 29/09/2015

Il faudrait que quelques jeunes chercheurs universitaires ou des chercheurs de l'Inserm s'y intéressent et conduisent quelques études. 
Ce serait bien que cette discussion soit vue par certains d'entre eux. Les laboratoires s'y intéresseraient s'ils pouvaient voir qu'il y a peut-être là de l'argent à gagner... Souvent, de jeunes chercheurs de l'Inserm créent leur start-up de développement d'un produit ou d'un autre. Pour les bactériophages ce serait la solution idéale.

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