Comprendre les manifestations cutanées liées aux maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI)

Que sont les MICI ? 

Les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (MICI), comprenant la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique (RCH), sont des affections qui se caractérisent par une inflammation de la paroi d'une partie du tube digestif, due à une dérégulation du système immunitaire intestinal. 

Outre les symptômes intestinaux bien connus tels que les douleurs abdominales, les diarrhées et les saignements rectaux, les MICI peuvent également provoquer des problèmes de peau. Ce sont des pathologies extra-digestives appelées manifestations extra-intestinales (MEI) comme les troubles oculaires. D’après l’Inserm, ces manifestations sont plus fréquentes en cas d’atteinte du côlon. 

Les manifestations cutanées sont donc courantes chez les personnes atteintes de MICI. On parle de dermatoses qui sont des maladies de peau.

Quels sont les principaux problèmes de peau associés aux MICI ? 

Les dermatoses apparaissant au cours des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI) peuvent être variées et comprendre : des problèmes de peau induits directement par les MICI, des atteintes dermatologiques associées aux MICI, des atteintes dermatologiques associées à l’utilisation des traitements des MICI (Ex. : les anti-TNFα) ou des problèmes cutanés liés aux carences dues à la malabsorption. 

Voici la liste des dermatoses/lésions et problèmes de peau liés aux MICI :  

Les dermatoses spécifiques aux MICI

Ces dermatoses ne sont pas forcément dépendantes de l’évolution des MICI et peuvent même apparaître avant le développement des symptômes digestifs permettant ainsi de faire le diagnostic de MICI de façon plus précoce. 

Les lésions granulomateuses spécifiques

Ces lésions se caractérisent par la formation de nodules inflammatoires dans la paroi intestinale, constitués principalement de cellules immunitaires et de tissu cicatriciel, contribuant à la fibrose et aux complications à long terme. Elles sont définies par un granulome giganto-cellulaire sans nécrose-caséeuse. 

Les lésions ano-périnéales 

Les aspects cliniques de ces dermatoses sont très variés, cela peut être des fissures péri-anales, des ulcérations linéaires et profondes avec des bords nets dites « en coup de couteau », des ulcérations creusantes pouvant entraîner une destruction du sphincter anal, des abcès se compliquant de fistules anales, périnéales ou recto-vaginales. 

Les lésions génitales

Ce sont des ulcérations linéaires vulvaires profondes ou un œdème labial douloureux. Les localisations masculines sont plus rares.  

Les lésions oro-faciales

Il s’agit également d’ulcérations, mais aussi, de sillons au niveau des gencives, d’ulcérations prenant l’aspect d’aphtes, d'hypertrophie gingivale et d’hyperplasie de la face interne des joues (volume anormalement important d'un tissu organique). 

Les lésions cutanées 

Elles sont rares. Il peut s’agir d’atteintes comme des érythèmes faciaux, des nodules acnéiformes et des pseudo érysipèles (infections de la peau).  

Les dermatoses réactionnelles

Ces lésions résultent souvent de l'inflammation chronique et se manifestent par des modifications tissulaires telles que l'œdème, la nécrose et l'hyperplasie épithéliale, pouvant entraîner des ulcérations et des fistules. Les plus fréquentes d’entre elles sont :  

L’érythème noueux 

Une manifestation cutanée caractérisée par des nodules inflammatoires douloureux et rouges, souvent localisés sur les membres inférieurs. 

L’aphtose buccale 

Une lésion caractérisée par des ulcères superficiels dans la cavité buccale. 

Le Pyoderma gangrenosum. 

Une affection cutanée plus rare mais grave, se manifestant par des ulcères profonds et douloureux avec des bords violacés et nécrotiques, nécessitant une intervention médicale urgente pour prévenir les complications sévères. 

Les lésions réactionnelles liées aux MICI peuvent aussi être des dermatoses neutrophiliques (DN), un syndrome de Sweet (SS), un syndrome arthrocutané, une pyostomatitepyodermite végétante (PPV) et des abcès aseptiques. 

Les dermatoses liées aux carences 

Ces dermatoses sont le résultat des malabsorptions intestinales et de l'inflammation chronique, entraînant des déficits nutritionnels. Parmi les affections possibles, on retrouve :  

L’hyperkératose folliculaire 

C’est l'accumulation de kératine autour des follicules pileux, conduisant à la formation de petites bosses rugueuses. 

Les ecchymoses 

Des lésions cutanées résultant de la rupture des vaisseaux sanguins sous la peau, souvent observées chez les patients atteints de MICI en raison de troubles de la coagulation et de la fragilité vasculaire associés à l'inflammation chronique. 

La dermite d’aspect séborrhéique 

C’est une inflammation de la peau caractérisée par des plaques rouges, squameuses et parfois grasses, pouvant se produire en raison des changements dans la composition des lipides cutanés et de la réponse immunitaire altérée. 

Les dermatoses conjointes aux MICI 

Celles-ci sont des maladies inflammatoires ou auto-immunes présentant des facteurs de prédisposition génétique parfois communs avec les MICI. Elles ont une évolution indépendante de celle de la MICI. Quelques exemples : 

L’épidermolyse bulleuse acquise 

Une maladie auto-immune rare de la peau caractérisée par la formation de bulles et de cloques sur la peau et les muqueuses. 

Les dermatoses chroniques 

La dermatose chronique fait référence à toute affection cutanée persistante et récurrente, souvent associée aux MICI. Ces dermatoses peuvent souvent nécessiter une gestion à long terme et peuvent être exacerbées par l'inflammation et les déséquilibres immunitaires associés aux MICI. 

Ces dermatoses associées peuvent être :  

• Le psoriasis, 
• La dermatite atopique (eczéma), 
• La dermatite herpétiforme, 
• Le lichen plan, 
• La dermatomyosite, 
• L'acné rosacée, 
• Le vitiligo 
• La pelade, 
• La sclérodermie, 
• Le syndrome de Gougerot-Sjögren, 
• Le lupus érythémateux systémique (LES), 
• Les vascularites, 
• La maladie de Verneuil. 

Il existe une particularité pour la dermatite atopique (eczéma), une étude a révélé que les personnes qui en sont atteintes présentent un risque accru de 34 % de développer une maladie inflammatoire de l’intestin (MICI) par rapport aux personnes ne souffrant pas de cette affection cutanée. 

Les dermatoses secondaires aux traitements 

L’utilisation de certains traitements comme les anti-Tumor Necrosis Factor (TNF) a amélioré la prise en charge des MICI. Cependant, des effets secondaires en particulier cutanés, ont été rapidement décrits chez les patients traités par ces molécules, notamment les éruptions psoriasiformes. 

Ces éruptions sont des manifestations cutanées similaires au psoriasis, caractérisées par des plaques rouges épaisses et squameuses sur la peau.

Comment prendre soin de sa peau lorsqu'on souffre de MICI ? 

Selon les cas, les différents problèmes de peau liés ou associés aux MICI guérissent avec le traitement du tube digestif ou, alors, nécessiteront un traitement local. 

La gestion des problèmes de peau chez les patients atteints de MICI nécessite une approche multidisciplinaire, impliquant souvent un gastro-entérologue et un dermatologue travaillant en étroite collaboration. En effet, les patients atteints de MICI présentent un risque légèrement accru de développer des cancers cutanés. 

Voici les recommandations pour prendre soin de sa peau lorsque l’on souffre de MICI : 

• Contrôler l'Inflammation 

Les médicaments anti-inflammatoires systémiques, tels que les corticostéroïdes et les immunosuppresseurs, peuvent être utilisés pour réduire l'inflammation et atténuer les symptômes cutanés. 

• Réaliser des soins cutanés doux 

Il est conseillé d’adopter une routine de soins cutanés douce et adaptée au type de peau. Cela peut inclure l'utilisation de nettoyants doux, de crèmes hydratantes non-irritantes et de produits de protection solaire pour éviter les exacerbations des problèmes de peau. 

• Éviter les déclencheurs connus 

Il faut savoir identifier et éviter les déclencheurs connus des problèmes de peau pour aider à minimiser les poussées. Cela peut inclure des facteurs tels que le stress, les allergies alimentaires, certains médicaments et les irritants cutanés. 

Ainsi, les personnes atteintes d’une MICI qui prennent ou prévoient de prendre des médicaments immunomodulateurs ou des agents biologiques doivent faire l’objet d’un dépistage du cancer de la peau tous les ans, utiliser une protection solaire et porter des vêtements protecteurs.