Agoraphobie : “Je suis malade quotidiennement et cela me handicape beaucoup."
Publié le 16 août 2023 • Par Candice Salomé
Amandine, dite mon_agoraphobie sur Instagram, est atteinte d’anxiété et d’agoraphobie depuis son plus jeune âge. Les manifestations de la maladie se sont accentuées avec les années, l’empêchant de travailler et de profiter de la vie. Désormais, grâce à un suivi qui lui convient, elle se sent mieux et entrevoit l’avenir de façon positive. Elle se livre dans son témoignage pour Carenity.
Découvrez vite son histoire !
Bonjour Amandine, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions.
Tout d’abord, pourriez-vous vous présenter ?
Bonjour,
Je m'appelle Amandine, j'ai 24 ans. J'ai fait des études d'aménagement paysager. Après quoi, j'ai travaillé en tant que vendeuse en jardinerie.
Depuis quelques mois, j'habite en colocation, nous sommes 6 à vivre sous le même toit.
Je passe la plus grande partie de mon temps avec mes proches ou à apprendre à connaître de nouvelles personnes. J'aime me balader et faire du sport. J'aime aussi cuisiner, mais surtout manger !
L'agoraphobie m'empêche actuellement de faire plus mais j'adorerais aller au cinéma, faire de l'accrobranche, des escape games, prendre le bateau ou l'avion. Partir voyager à l'aventure !
Comment s’est manifestée l’agoraphobie dans votre vie ? Quel âge aviez-vous ?
J'ai une peur panique à l'idée de faire un malaise, de voir quelqu'un faire un malaise ou quoiqu'il puisse se passer qui inclurait du sang, du médical ou une blessure. Je déteste perdre le contrôle de la situation ou de mon corps.
J'ai toujours été anxieuse, j'ai passé mon enfance à faire des malaises vagaux. Ces malaises étant le résultat d'un état anxieux. A cette époque, j'étais incapable d'extérioriser autrement.
A 10 ans, je faisais déjà mes premières crises d'angoisses (je n'ai compris que récemment que cela était des crises d'angoisses).
Comme le médical m'angoisse beaucoup, je mets en place des stratégies d'évitement et ce depuis le collège. C'est là que l'agoraphobie commence à doucement s'installer.
J'évite tout rendez-vous médical. Je n'ai jamais fait de prise de sang, pas de vaccins depuis des années, pas de dentiste, d'ophtalmologue ni de gynécologue.
Les cours de SVT me faisaient peur aussi, alors je n'y allais pas ! A force d'éviter, ça s'est étendu sur des choses qui n'ont rien à voir avec le médical : coiffeur, magasins, restaurants, cinémas, transports en commun.
A 17 ans, l'école devient un endroit inaccessible, prendre le bus puis rester assise 7h dans une salle de classe est impensable pour moi. J'arrête le lycée en cours d'année, je n'arrive pas à tenir jusqu'au bac.
Soulagée de quitter l'école, mon entrée dans le monde du travail se fait paisible. Je passe le permis alors ma mobilité est plus facile, plus besoin de prendre le bus ou le train ! J'ai environ 3 ans de répit.
J'évite toujours les rendez-vous médicaux mais je peux tout de même aller au cinéma, en boîte de nuit ou partir en vacances ! La belle vie. Jusqu'à… l'arrivée du Covid !
Que s’est-il passé à ce moment-là ?
Du médical partout. Les angoisses qui se multiplient. Les confinements passent et je ne suis plus capable d'aller au travail, plus capable d'avoir un seul loisir, même plus capable de sortir de chez moi.
Je reste presque 2 ans enfermée chez moi à faire des crises d'angoisse à répétition. Je suis malade du matin au soir, du soir au matin. Je ne mange plus car j'ai peur d'être malade, je ne me douche plus car j'ai peur de faire un malaise, le moindre effort physique m'essouffle et me fait paniquer. Je ne vois plus personne, même ouvrir au livreur m'angoisse.
Quel a été votre suivi ? Quel est-il aujourd’hui ?
Enfant, j'ai déjà été voir des psychologues mais je n'ai jamais accroché, j'en ai une expérience peu concluante.
Je décide quand même de consulter une psychologue au bout de 6 mois sans sortir, mais tout s'empire. Je suis dans le déni et je veux qu'on me sorte de là, qu'on fasse les choses à ma place. J'arrête de la consulter au bout de 3 séances.
Un an plus tard, je consulte à nouveau et ça fonctionne ! Je commence à aller de mieux en mieux. C'est dur et ça prend énormément de temps et d'énergie mais je guéris.
J'ai fait le choix de ne pas prendre de médicaments car cela m'angoisse encore plus. J'ai, en parallèle, un soutien immense de mon entourage, je les sollicite régulièrement et ils répondent présents malgré mes annulations à répétition.
Je ne sais pas si c'est cette psychologue qui est géniale, si c'est parce que j'ai enfin changé mon état d'esprit ou si c'est les deux, mais ça marche !
Comment vous sentez-vous désormais ?
Deux ans après avoir remis le pieds dehors pour la première fois, je consulte toujours cette psychologue une à deux fois par mois.
Je ne travaille toujours pas, l'allocation adulte handicapé m'aide à payer mon loyer et à me nourrir.
Il m'arrive encore de faire des crises d'angoisse, beaucoup moins qu'avant. J'ai toujours un état permanent d'hypervigilance. J'ai souvent des bouffées de chaleur, la gorge nouée, mal au ventre et la tête qui tourne. Je ne peux plus manger ce que je veux, mon estomac est fragile à cause des angoisses.
Je suis malade quotidiennement et cela me handicape. J'ai besoin de repos et de moments seule, d'avoir un emploi du temps flexible que je peux modifier à tout moment. Si je vais faire les courses, c'est rarement seule, et cela peut me prendre l'énergie de toute une journée.
Le plus dérangeant, selon moi, c'est le fait ne pas pouvoir aller chez le coiffeur, chez l'esthéticienne, aller faire les magasins de vêtements ou des activités pour prendre soin de moi.
Comment envisagez-vous l’avenir ?
A l'avenir, j'aimerais recommencer à travailler, peut-être sur un temps partiel. M'engager dans une association pour aider les personnes isolées socialement ou ayant des troubles anxieux. Je ne sais pas si je serai capable de reprendre un temps plein un jour.
Toujours est-il qu'il y a deux ans, je n'envisageais pas de pouvoir retravailler un jour, aujourd'hui c'est mon objectif 1er. Comme quoi tout est possible, il faut croire en l'avenir !
Vous partagez votre quotidien sur les réseaux sociaux. Dans quel but ?
Les réseaux m'ont permis d'échanger avec un tas de personnes comme moi, qui avaient besoin d'être écoutées et qui pouvaient m'écouter.
J'ai vu qu'on pouvait s'en sortir, qu'il n'y avait pas de solution miracle et qu'il faudrait donner de ma personne, mais que c'était possible. En parler sur les réseaux m'aide à avoir des retours et conseils pour que je puisse continuer d'avancer, et je crois que cela aide les autres de voir qu'ils ne sont pas seuls. Sans les réseaux, je n'aurais pas eu toute cette motivation et cette force pour m'en sortir.
Sur Internet, choisissez de regarder des contenus motivants, qui vous poussent vers le haut et qui vous font vous sentir bien. Désabonnez-vous des comptes qui jouent sur vos humeurs, vous culpabilisent et vous font vous sentir nuls. Les réseaux ne sont pas représentatifs de la vraie vie.
Quels conseils pourriez-vous donner aux membres Carenity qui, comme vous, souffrent d’agoraphobie ?
Consultez un ou une psychologue aussi souvent que possible. Même quand ça va mieux, soyez constant dans votre suivi. Si votre psy ne vous convient pas, changez-en. Dites-lui, il/elle ne le prendra pas mal car son but est que vous alliez mieux. Parfois vous aurez besoin de voir 10 psychologues différents avant d'en trouver un qui vous convient.
Si vous n'avez pas le budget tourner vous vers les CMP, c'est gratuit. Les psychiatres sont remboursés et même certains psychologues ! Mettez toutes les chances de votre côté. Personne ne le fera pour vous alors foncez !
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