Les visites à domicile, en faire ou pas ?
Publié le 15 mai 2018
Pour les patients polypathologogiques, dépendants ou en fin de vie, la visite s'avère indispensable pour maintenir à domicile la population vieillissante. Si leur nombre s'est considérablement réduit depuis 2003, les visites effectuées par les médecins restent ancrées dans leur pratique et peuvent être très instructives sur l'environnement du malade.
La question de réaliser des visites peut se poser pour les nouveaux médecins. Depuis quelques années, la tendance est à la limitation des déplacements au domicile des patients. Les généralistes réalisent 23 millions de visites par an actuellement contre 77 millions en 2003. La visite « de confort » n’existe plus. Dorénavant, on parle « de prise en charge coordonnée à domicile ». Le suivi à domicile demeure primordial pour prendre en charge les pathologies chroniques dépendantes. Et les jeunes ne s'en désinvestissent pas. Selon des statistiques de l'Assurance maladie présentées lors du dernier congrès de la médecine générale (CMGF) à Paris, les jeunes omnipraticiens âgés de 30 à 39 ans représentaient 15 % des généralistes en activité en 2016... et ils réalisaient 15 % du total des visites à domicile.
Organisation et optimisation
Selon une enquête de l'URPS Ile-de-France publiée en 2017, 89 % des médecins généralistes franciliens se déplacent au domicile de leurs patients. Soit le médecin dédie une demi-journée hebdomadaire, soit ces visites s’organisent au coup par coup. Mais l’organisation et l’optimisation du temps prévalent. Certains témoignages concordent ainsi sur le confort gagné : « Tout est sur rendez-vous et j’ai des créneaux pour l’urgence et des plages réservées pour les visites à domicile. » Le temps passé auprès du patient est en effet nettement plus important chez le malade ; le temps déclaré en moyenne est ainsi d’une cinquantaine de minutes, transport compris.
Pour une visite en EPHAD, le médecin prend à chaque consultation en général deux fois plus de temps qu’au cabinet. Aussi pour des visites, certains praticiens divisent leur secteur pour optimiser le temps de voiture, chaque temps hebdomadaire étant consacré à un seul secteur géographique. Chaque généraliste réalise en moyenne, selon cette étude, 9 visites hebdomadaires.
L’organisation autour du patient à domicile est multiple. Le médecin travaille donc en coordination avec les infirmiers et les kinésithérapeutes libéraux, avec les auxiliaires de vie, les aides-soignants et les aides ménagères. Des aidants bénévoles (proche, famille, voisin...) peuvent aussi intervenir dans cet espace coordonné.
Quand on décortique les raisons qui poussent les libéraux à cette pratique, ils déclarent à 64 % que c’est le rôle du médecin de famille. Mais plus de la majorité considèrent cependant ces visites comme une contrainte.
Freins
Le manque de temps et de rémunération pécuniaire (la visite est rémunérée 35 euros) sont les premières raisons qui freinent l’enthousiasme pour la visite à domicile. L’insécurité et le peu de visibilité du dossier du patient ainsi que des conditions matérielles jugées insuffisantes résument ensuite les blocages des médecins.
Des médecins généralistes interrogés lors de l'enquête soulèvent l’inconfort matériel, hygiénique et médical parfois vécu pendant les visites à domicile : « C’est tellement sale » ; « Quelques fois, il faut monter 5 étages, quand j’étais enceinte c’était vraiment fatigant » ; « Il y a la peur parfois, le chien qui aboie sur vous et la personne a perdu la muselière ».
Les praticiens libéraux accusent enfin le manque d’organisation de ces visites, le temps perdu, le stationnement difficile et la culpabilité générée par des patients voire la pression qu’ils exercent pour faire venir le médecin.
De multiples témoignages récoltés par Le Généraliste soulignent les agacements du quotidien pour effectuer ces visites, les difficultés de stationnement avec parfois des amendes.
Un moment instructif
Même si elle est parfois vécue comme un sacerdoce, chronophage et peu rentable, la visite à domicile demeure un acte primordial, qui permet aux généralistes de récolter des informations précieuses sur l'environnement des malades (habitation, alimentation, habitudes de vie...).
Sur le terrain, des médecins généralistes soutenus par des représentations syndicales, imaginent ou expérimentent des alternatives à certaines visites à domicile. Des prises en charge globalisées sur un forfait, le transport des patients jusqu’au médecin, ou la mise en place d’un service dédié aux visites à domicile, sont des propositions encore peu expérimentées mais envisagées pour l’avenir.
Et vous, avez-vous des visites à domicile ?
Le Généraliste
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